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M. de Maurepas m’écrit, M. d’Argenson m’écrit ; tout le monde me dit : « Agissez. » Mais malgré tant de raisons d’agir, malgré l’assurance où je suis que le Préservatif ne peut m’être imputé, je persiste encore à faire présenter requête, signée de procureur, par MM. de Castera, Andry, Procope, Mouhy, etc. Deux noms suffiraient : je me charge du reste. L’audience de monsieur le chancelier devient inutile, mais la requête de mes parents devient nécessaire. Vous verrez par la lettre de M. Hérault, qui est entre les mains de Mme de Champbonin, qu’on ne peut ni ne doit agir par lettres de cachet, voie toujours infiniment odieuse, et que moi-même je déteste. Représentez, je vous prie, très-fortement à M. d’Argental que toutes les preuves étant contre Desfontaines et rien contre moi, c’est me manquer à moi-même que de ne pas agir vigoureusement. Tenez, je vous supplie, les preuves contre Chaubert prêtes.

Je n’ai que le temps de vous embrasser.


1079. — À M. LE LIEUTENANT GÉNÉRAL DE POLICE[1].
21 février.

Je suis assurément bien plus touché, bien plus consolé de vos bontés, que je ne suis sensible aux impostures abominables d’un homme dont les iniquités de toute espèce sont si bien connues de vous. Je vous parle, monsieur, et comme au juge qui peut le punir selon les lois, et comme au protecteur des lettres, au pacificateur des citoyens et au père de la ville de Paris ; comme à mon juge, je ne balancerai pas à vous présenter requête, et c’est à votre tribunal seul que j’ai souhaité de recourir, parce que j’en connais la prompte justice, que vous êtes instruit du procès, et que vous avez déjà condamné cet homme en pareil cas.

Mais, monsieur, daignez considérer comme juge que, si l’abbé Desfontaines défend ses calomnies par de nouvelles impostures, il faut que je vienne à Paris pour me défendre. Il y a plus de trois mois que je suis hors d’état d’être transporté ; vous connaissez ma santé languissante. Si je pouvais me flatter que vous pussiez nommer un juge du voisinage pour recevoir et vous renvoyer juridiquement mes défenses, et pour se transporter à cet effet au château de Cirey, je suis prêt à former la plainte en mon nom. Cependant, c’est une grâce que je n’ose pas demander, car je sens très-bien, malgré toute l’indulgence qu’on peut avoir pour

  1. Éditeur, Léouzon Leduc.