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l’abbé Desfontaines même écrite au sortir de Bicêtre[1]. Puis-je moins demander, monsieur, que le désaveu de ces calomnies si hostiles et si prouvées ? Et quand vous êtes prêt à punir le coupable, n’aurez-vous pas quelque bonté pour le citoyen offensé ? Je parle à l’homme autant qu’au juge. Je parle à mon protecteur aussi bien qu’au magistrat. Songez que le moment où j’ai servi autrefois l’abbé Desfontaines est l’époque de ses fureurs contre moi. Voyez la lettre du sieur Dulion, voyez celle de Thieriot, du 16 août 1726, dans laquelle il m’avertit que Desfontaines, pour récompense, a fait, contre moi, un libelle. Considérez, monsieur, je vous en conjure, qu’il m’a persécuté, calomnié pendant des années ; écoutez la voix publique. Songez qu’un écrit intitulé le Préservatif, que je n’ai ni imprimé, ni fait, a été le prétexte de son libelle, qu’il a fait et imprimé, distribué et avoué publiquement. Je sais ses récriminations ; mais, monsieur, est-ce un crime de se plaindre d’un ingrat et d’un calomniateur ? Je porte à votre tribunal les mêmes plaintes qu’à tous les honnêtes gens. Est-ce à lui à m’accuser d’avoir écrit, il y a deux ans, qu’en effet il avait payé mes bienfaits d’un libelle ? Oui, monsieur, c’est précisément de quoi je demande vengeance. Je la demande, et de ce libelle fait en 1726, et de vingt autres, et surtout du dernier[2]. Je la demande avec tous les gens de lettres, avec tout le public, qui vous en aura obligation ; mais cette vengeance n’est autre chose qu’un désaveu nécessaire à mon honneur. Il ne m’appartient pas de vous prier de punir, mais je dois vous supplier de faire cesser un si horrible scandale. Je vous demande ce désaveu, monsieur, et par cette lettre, et par ce placet ci-joint.

Requête du sieur de Voltaire.

1° Le sieur de Voltaire représente très-humblement qu’il est très-vrai qu’en 1725 il fit tous ses efforts auprès de feu M. le maréchal de Villars pour faire tirer de Bicêtre le sieur Desfontaines, qui y était enfermé pour avoir corrompu plusieurs ramoneurs ; et M. le comte de Maurepas peut se souvenir de tous les soins que le sieur de Voltaire se donna pour lors ;

2° Il est très-vrai que l’abbé Desfontaines pour toute récompense fit un libelle contre le sieur de Voltaire ;

3° Il est très-vrai qu’il n’a cessé d’attaquer pendant dix ans

  1. Cette lettre est du 31 mai 1724 ; nous l’avons donnée sous le n° 110.
  2. La Voltairomanie