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Je crois, mon cher ami, que vous voilà délivré de cette affaire. Mettez-moi aux mains avec le praticien.

Avez-vous envoyé il y a quelques mois un Newton à M. d’Argental pour un président de ses amis ?

Avez-vous passé douze cents livres à l’ordre de Mme de La Neuville ?

Il y aura aussi environ sept cents livres à payer à l’ordre de M. Denis, et cent livres pour du Sauzet.

Nous parlerons des autres affaires temporelles une autre fois.

Voici un paquet pour M. d’Argental. Envoyez-le sur-le-champ.

Je vous embrasse de tout mon cœur.


1051. — À M. HELVETIUS.
Janvier.

Mon cher ami, toutes lettres écrites, tous mémoires brochés, toute réflexion faite, voici à quoi je m’arrête : je vous prends pour avocat et pour juge.

Thieriot avait oublié que l’abbé Desfontaines l’avait traité de colporteur et de faquin dans son Dictionnaire néologique ; il avait peut-être aussi oublié un peu les marques de mon amitié ; il avait surtout oublié que j’avais dix lettres de lui, par lesquelles il me mandait autrefois que Desfontaines est un monstre ; qu’à peine sauvé de Bicêtre par mon secours il fit un libelle contre moi, intitulé Apologie[1] ; qu’il le lui montra, etc. Thieriot, ayant donc oublié tant de choses, et le vin de Champagne de La Popelinière lui ayant servi de fleuve Léthé, il se tenait coi et tranquille ; faisait le petit important, le petit ministre avec Mme du Châtelet ; s’avisait d’écrire des lettres équivoques, ostensibles, qu’on ne lui demandait pas ; et, au lieu de venger son ami et soi-même, de soutenir la vérité, de publier par écrit que la Voltairomanie est un tissu de calomnies ; enfin, au lieu de remplir les devoirs les plus sacrés, il buvait, se taisait, et ne m’écrivait point. Mme de Bernières, mon ancienne amie, outrée du libelle, m’écrit, il y a huit jours, une lettre pleine de cette amitié vigoureuse dont votre cœur est si capable, une lettre où elle avoue hautement tout ce que j’ai fait, tout ce que j’ai payé entre ses mains par[2]

  1. Voyez tome XXIII, pages 35, 39 et 59, et ci-dessus, lettre 1005.
  2. On doit probablement lire ici pour, au lieu de par. En 1723 et 1724, Voltaire payait chez le président de Bernières 1,800 livres de pension, dont moitié pour Thieriot.