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j’insiste qu’on commence le procès par une requête présentée au nom des gens de lettres, qu’ensuite mes parents en présentent une au nom de ma famille outragée, sauf à moi à m’y joindre, s’il est nécessaire.

J’espérais que, sans forme de procès, et indépendamment du châtiment que le magistrat de la police peut et doit infliger à l’abbé Desfontaines, je pourrais obtenir un désaveu des calomnies de ce scélérat, désaveu qui m’est nécessaire, désaveu qu’on ne peut refuser aux preuves que j’ai rapportées.

Enfin j’en reviens toujours là : point de preuves contre moi, sinon que j’ai écrit la lettre qui est dans le Préservatif. Or, cette lettre, que dit-elle ? Que Desfontaines a été tiré de Bicêtre par moi, et qu’il m’a payé d’ingratitude. Encore une fois, cette lettre doit être regardée comme ma première requête contre Desfontaines. D’ailleurs, rien de prouvé contre moi, et tout démontré contre lui. Enfin j’insiste sur le désaveu de ses calomnies, et j’attends tout des bontés de mon cher ange gardien.

Je serais bien honteux de tant d’importunités, si vous n’étiez pas M. d’Argental.

Adieu ; mon cœur ne peut suffire à mes sentiments pour vous, et à ma tendre reconnaissance.


1038. — À M. THIERIOT.
Ce 23 janvier.

M. du Châtelet étant absent, et madame la marquise ayant ordre d’ouvrir ses lettres, elle a heureusement lu la vôtre, et elle vous donne la marque d’amitié de vous la renvoyer. Elle n’est ni française, ni décente, ni intelligible, et M. du Châtelet, qui est très-vif, en eût été fort piqué. Je vous la renvoie donc, mon cher Thieriot ; corrigez-la comme je corrige mes Épitres[1]. Il faut tout simplement lui dire que « vous aviez prévenu tous ses désirs ; que, si vous avez été si longtemps sans écrire, c’est que vous avez été malade : qu’il y a longtemps que vous savez qu’en effet j’ai remboursé toutes les souscriptions que les souscripteurs négligents n’avaient pas envoyées en Angleterre, et que vous ne croyez pas qu’il en reste ; mais que, s’il en restait, vous vous en chargeriez avec plaisir pour votre ami : qu’à l’égard de l’abbé Desfontaines, vous pensez comme tout le public, qui le déteste

  1. Alors publiées sous le titre d’Épîtres, et depuis sous celui de Discours sur l’Homme. Voyez tome IX.