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Encore une fois, mandez-lui que vous ne balancez pas un moment entre Desfontaines et votre ami ; rendez gloire à la vérité. Non, vous n’avez point oublié le titre du libelle de Desfontaines ; il était intitulé Apologie du sieur de Voltaire. Elle en a ici la preuve dans deux de vos lettres ; nous en avons parlé dans votre dernier voyage. Paraître reculer, paraître se rétracter avec elle, c’est un outrage. Hélas ! c’en serait un de ne pas engager le combat pour son ami. Oue sera-ce de fuir dans la bataille !

Des amis de deux jours brillent de prendre ma défense, et vous m’abandonnerez, tendre ami de vingt-cinq ans ! Vous donnerez à M. de Riclielieu le sujet de dire encore que je suis décrié par vous-même ! Que dira le prince royal ? Que diront ceux qui savent aimer ?

Peut-être qu’à souper, chez Laïs ou Catulle,
Cet examen profond passe pour ridicule[1].

Mais, mon ami, n’est-on fait que pour souper ? Ne vit-on que pour soi ? N’est-il pas beau de justifier son goût et son cœur, en justifiant son ami ?

Dites-moi tout naturellement si vous avez envoyé le libelle au prince royal. Cela est d’une importance extrême. Parlez à M. d’Argenson[2], dites-lui les choses les plus tendres pour moi. Voyez M. d’Argental. Écrivez au prince que je suis malade, et comptez sur votre ami pour jamais.


1010. — À M. L’ABBÉ MOUSSINOT[3].
Ce 8 (janvier 1739).

Mon cher abbé, c’est ici qu’il faut servir votre ami.

Mettons à quartier toute affaire, et ne songeons qu’à celle du libelle diffamatoire.

1° D’abord, voici mon nouveau mémoire, que je vous prie d’envoyer sur-le-champ, avec la lettre ci-jointe, à M. d’Argental.

2° Non-seulement je vous réitère la prière de parler fortement à Mme de Bernières, mais je vous conjure de prendre force fiacres, de dire à Demoulin qu’il me serve selon les lettres qu’il a reçues, et de le bien encourager.

3° Non-seulement il doit agir de son côté avec la dernière

  1. Vers 16 du sixième Discours sur l’Homme.
  2. Le marquis d’Argenson, auquel est adressée la lettre 1097.
  3. Édition Courtat.