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édition des Éléments de Newton[1]. J’ai reçu aussi quelques imprimés sur le même sujet.

Comme je crois avoir, à propos de cet ouvrage, quelque chose à dire qui ne sera pas inutile aux belles-lettres, souffrez que je vous prie de vouloir bien insérer dans votre feuille les réflexions suivantes.

Il est vrai, comme vous le dites, monsieur, que j’ai envoyé à plusieurs journaux des Éclaircissements[2] en forme de préface, pour servir de supplément à l’édition de Hollande, et j’apprends même que les auteurs du Journal de Trévoux ont eu la bonté d’insérer, il y a un mois, ces Éclaircissements dans leur journal. Si les nouveaux éditeurs des Éléments de Newton ont mis cette préface à la tête de leur édition, ils ont en cela rempli mes vues.

Je vois par votre feuille que les éditeurs ont imprimé, dans cette préface, cette phrase singulière, qu’une maladie a éclairé la fin de mon ouvrage ; et vous dites que vous ne concevez pas comment la fin de mon ouvrage peut être éclairée par une maladie : c’est ce que je ne conçois pas plus que vous ; mais n’y aurait-il pas, dans le manuscrit, retardé[3] au lieu d’éclairé ? Ce qui peut-être est plus difficile à concevoir, c’est comment les imprimeurs font de pareilles fautes, et comment ils ne les corrigent pas. Ceux qui ont eu soin de cette seconde édition doivent être d’autant plus exacts qu’ils reprochent beaucoup d’erreurs aux éditeurs d’Amsterdam, qui ont occasionné des méprises plus singulières.

Comme je n’ai nul intérêt, quel qu’il puisse être, ni à aucune de ces éditions, ni à celle qui va, dit-on, paraître en Hollande de ce qu’on a pu recueillir de mes ouvrages, je suis uniquement dans le cas des autres lecteurs ; j’achète mon livre comme les autres, et je ne donne la préférence qu’à l’édition qui me paraît la meilleure.

Je vois avec chagrin l’extrême négligence avec laquelle beaucoup de livres nouveaux sont imprimés. Il y a, par exemple, peu de pièces de théâtre où il n’y ait des vers entiers oubliés. J’en remarquais dernièrement quatre qui manquaient dans la comédie du Glorieux, ce qui est d’autant plus désagréable que peu de comédies méritent autant d’être bien imprimées. Je crois, mon-

  1. Voyez le Pour et Contre, tome XV.
  2. Voyez ces Êclaircissernents, tome XXII, page 267.
  3. C’est ce qu’on lit dans l’édition de Londres (Paris), 1738, que j’ai sous les yeux (voyez tome XXII, page 273. Mais les libraires hollandais, en réimprimant ces Éclaircissements pour les joindre aux exemplaires qui leur restaient de leur édition des Éléments, avaient imprimé éclairé au lieu de retarde (B.)