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Je n’ai pas pu laisser votre portrait entre les mains de Césarion. J’ai envié à mon ami d’avoir conversé avec vous, et de posséder encore votre portrait. C’en est trop, me suis-je dit, il faut que nous partagions les faveurs du destin. Nous pensons tous de même sur votre sujet, et c’est à qui vous aimera et vous estimera le plus.

J’ai presque oublié de vous parler de vos pièces fugitives : la Moderation[1] dans le bonheur, le Cadenas, le Temple de l’Amitié, etc., tout cela m’a charmé. Vous accumulez la reconnaissance que je vous dois. Que la marquise n’oublie pas d’ouvrir l’encrier. Soyez persuadé que je ne regrette rien plus au monde que de ne pouvoir vous convaincre des sentiments avec lesquels je suis, monsieur, votre très-fidèlement affectionné ami.

Fédéric

848. — À M. L’ABBÉ MOUSSINOT[2].
Ce 3 avril (1738).

En réponse à celle du 31 mars.

Je vous renvoie, mon cher abbé, la reconnaissance de M. Michel, et je persiste à lui donner vingt mille livres en rentes viagères, et à lui laisser vingt mille livres au denier cinq par des billets renouvelables de trois en trois mois. Nous mettrons tout le reste en actions : ainsi voilà nos affaires arrangées.

Je n’ai point à écrire à M. de Gennes. C’est monsieur votre frère qui doit avertir M. Clément, ou tel autre fondé de procuration, que l’échéance est arrivée, et, si on ne paye point, je ne connais qu’un exploit en ce cas pour toute lettre. M. de Gennes est fermier général de Bretagne ; s’il ne paye pas, c’est une très-mauvaise volonté, à quoi la justice est le seul remède. En un mot, c’est à un huissier à faire tous les compliments dans cette affaire, et je vous supplie de ne pas épargner cette politesse. Un petit mot de lettre à M. d’Auneuil ne coûte que quatre sous pour un Savoyard, et ne gâtera rien.

Si M. de Barassy ne me rend pas mes deux mille livres, dont il s’est emparé fort mal à propos, je me flatte que M. le lieutenant civil me les fera rendre. Il ne faut pas assurément le ménager.

Pour M. Tanevot, je prie monsieur votre frère de lui écrire encore, et de lui dire que je suis malade. S’il ne fait point de réponse, il faudra s’adresser au premier commis de M. de Saint-Florentin, dont j’ignore le nom ; mais, pour moi, je vous prie de

  1. Allusion à l’un des trois premiers Discours sur l’Homme, et non au quatrième, que le prince n’avait pas encore reçu, mais qu’il semble indiquer ici.
  2. Édition Courtat.