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Cependant ne nous décourageons point ; cueillons quelques fleurs dans ce monde, qu’il a mesuré, qu’il a pesé, qu’il a seul connu. Jouons sous les bras de cet Atlas qui porte le ciel : faisons des drames, des odes, des guenilles. Amiez-moi, consolez-moi d’être si petit. Adieu, mon cher ami, mon cher maître.


663. — À M. DE PONT DE VEYLE[1],
lecteur du roi.
À Cirey, le 19 octobre.

J’apprends, monsieur, le détail des obligations que je vous ai ; vous n’êtes pas de ces gens qui souhaitent du bien à leurs amis, vous leur en faites. D’autres diraient : « Comment se tirerat-on de là ? la chose est embarrassante ; » et, quand ils auraient plaint leur homme, le laisseraient là, et iraient souper. Pour vous, vous raccommodez tout, et très-vite, et très-bien ; et vous servez vos amis de toutes façons, et vous leur faites des vers, et vous leur coupez des scènes, et les pièces sont jouées, et la police et les sifflets ont un pied de nez, et, malgré les mauvais plaisants, on réussit.

Ajoutez vite à toutes vos bontés celle de me faire tenir cet enfant par la poste. Vous pouvez aisément me faire contresigner cet enfant-là, ou vous, ou monsieur votre frère ; et puis, s’il vous plaît, dites-moi l’un et l’autre comment cela va ; s’il faut bien corriger, si cela peut devenir digne de paraître au grand jour de l’impression ; je vous croirai, par amabile fratrum[2]. Pourquoi Mlles Fessard disent-elles que cela est de moi ? Pourquoi Mme de Saint-Pierre[3] l’assure-t-elle ? Je ne l’ai point avoué, je ne l’avouerai pas. Je ne me vante que de votre amitié, de vos bontés, de mon tendre attachement pour vous, et point du tout de l’enfant.


664. — À MADEMOISELLE QUINAULT.
À Cirey, ce 19 … 1736.

Charmante Thalie, j’ai bien peur que l’Enfant prodigue ne soit bientôt enterré avec la chienne noire ; mais il n’y a ni ouvrage

  1. Antoine de Ferriol, compte de Pont-de-Veyle, frère du comte d’Argental, naquit le 1er octobre 1697, et mourut le 3 septembre 1774. Il avait été camarade de collège de Voltaire.
  2. Il va dans Horace, livre II, satire iii, vers 243, par nobile fratrum.
  3. Celle à qui est adressée la lettre 346.