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ANNÉE 1721.

46. — À M. THIERIOT[1].

1721.

[2]Je suis encore incertain de ma destinée. J’attends M. le duc de Sully pour régler ma marche. Comptez que je n’ai d’autre envie que de passer avec vous beaucoup de ces jours tranquilles dont nous nous trouvions si bien dans notre solitude.

Je viens d’écrire une lettre à M. de Fontenelle, à l’occasion d’un phénomène qui a paru dans le soleil, hier jour de la Pentecôte[3]. Vous voyez que je suis poëte et physicien. J’ai une grande impatience de vous voir, pour vous montrer ce petit ouvrage dont vous grossirez votre recueil.

Avez-vous toujours, mon cher ami, la bonté de faire en ma faveur ce qu’Esdras fit pour l’Écriture sainte, c’est-à-dire d’écrire de mémoire mes pauvres ouvrages[4] ? S’il y a quelque nouvelle à Paris, faites-m’en part. J’espère de vous y revoir bientôt dans cette bonne santé dont vous me parlez. Comme la ressemblance de nos tempéraments est parfaite, je me porte aussi bien que vous ; je crois cependant que vous avez eu hier mal à l’estomac, car j’ai eu une indigestion.

Adieu ; je vous embrasse de tout mon cœur.



47. — À M. THIERIOT.

1721.

J’irai à Châtenay, mon cher Thieriot, de dimanche en huit. Si vous êtes de ces héros qui préfèrent les devoirs de l’amitié aux caprices de l’amour, vous viendrez m’y voir. J’ai retrouvé votre livre vert ; Génonville vous l’avait escamoté. Renvoyez-moi ma lettre à M. de Fontenelle, et ses réponses. Tout cela ne vaut pas grand’chose ; mais il y a dans le monde des sots qui les trouveront bonnes : ce n’est ni vous ni moi. Adieu. J’ai été saigné de mon ordonnance : je m’en suis assez mal trouvé. Un médecin

  1. Ce fut chez le procureur Alain, en 1714, que le goût de la littérature et des spectacles commença à lier Voltaire avec Thieriot. La véritable orthographe de son nom est Thieriot, et non Thiériot. Voltaire écrivait toujours Tiriot. Né en 1696, mort en novembre 1772. (Cl.)
  2. Dans la correspondance inédite publiée par : MM. E. Bavoux et François, cette lettre commence ainsi : « Comment vont vos craintes sur la paralysie (il s’agit du père de Thieriot) ? Informez-moi, je vous en prie, de votre santé. Si monsieur votre père n’était pas à Boissette, j’irais vous y voir. Je suis encore, etc. »
  3. Cette fête, en 1721, fut le 1er juin. Cette lettre est donc du 2.
  4. Ici finit la lettre publiée par MM. de Cayrol et François. Ce qui suit se trouve aussi dans la lettre no 44.