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Vous vantez la taille d’Hercule
Devant des nains et des bossus.

En vérité, je ne saurais vous dire trop de bien de ce petit ouvrage. Vous avez ranimé dans moi cette ancienne idée que j’avais d’un Essai sur le Siècle de Louis XIV. S’il n’y avait que l’histoire d’un roi à faire, je ne m’en donnerais pas la peine ; mais son siècle mérite assurément qu’on en parle ; et, si jamais je suis assez heureux pour avoir sous ma main les secours nécessaires, je ne mourrai pas que je n’aie mis à fin cette entreprise. Ce que vous dites en vers de tous les grands hommes de ce temps-là sera le modèle de ma prose ;

Car, s’ils n’étaient connus par leurs écrits sublimes,
Vous les eussiez rendus fameux ;
Juste en vos jugements, et charmant dans vos rimes,
Vous les égalez tous lorsque vous parlez d’eux.

Il est bien vrai que M. Cassini n’a pas découvert la route des astres, et qu’il ne nous a rien appris sur cela ; mais il a découvert le cinquième satellite de Saturne, et a observé le premier ses révolutions. Cela suffit pour mériter l’éloge que vous lui donnez. On sait bien que ce n’est pas lui qui a fait le premier almanach. On pourrait, si on voulait, vous dire encore que Boileau a commencé à travailler longtemps avant que Quinault fit des opéras. On doit être assez content quand on n’essuie que de pareilles critiques.

Je n’ai lu aucun ouvrage nouveau, hors l’Écumoire[1] de ce grand enfant, et les Princesses Malabares[2] de je ne sais quel animal qui a trouvé le secret de faire un fort mauvais livre sur un sujet où il est pourtant fort aisé de réussir.

Je connaissais les Mémoires du maréchal de Villars. Il m’en avait lu quelque chose, il y a plusieurs années. Il changea l’abbé Houteville, deux ans avant sa mort, du soin de les arranger. Vous croyez bien que les endroits familiers sont du maréchal, et que ceux qui sont trop tournés sont de l’auteur de la Religion chrétienne prouvée par les faits[3]. Je crois que M. le duc de Villars a eu la bonté de me les envoyer dans un paquet qu’il a fait adres-

  1. Voyez la note de la lettre 449.
  2. De Louis-Pierre de Longue ; Andrinople, 1734, in-12.
  3. L’abbé Houteville (voyez la note, tome XX, page 454). Il fit l’éloge du maréchal de Villars, dans le discours qu’il prononça le 9 décembre 1734 ; mais ce fut l’abbé Margon qui fabriqua une partie des Mémoires du duc de Villars.