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dissement, si j’ose ainsi parler, des traits de lumière qui sont repoussés comme une balle par une muraille, Pemberton[1], que j’ai entre les mains, le dit positivement, et il n’y a pas d’apparence qu’il en impose à son maître. Il s’étend fort sur cet article, à la page 239 et suivantes, et il met au nombre des plus étonnants et des plus beaux paradoxes de M. Newton cette proposition, que « la lumière n’est pas réfléchie, en rejaillissant sur les parties solides des corps ».

Je n’ai pu m’étendre, dans mes Lettres, ni sur cette particularité, ni sur tant d’autres : il aurait fallu faire un livre de philosophie, et je suis à peine capable d’entendre le vôtre. J’ai cru seulement être obligé, en parlant de tous les beaux-arts, de faire un peu connaître M. Newton à des ignorants comme moi, in quantum possum et in quantum indigens.

Adieu ; je vous aime et je vous admire, mais j’ai bien peur d’être obligé d’abandonner toute cette philosophie : c’est un métier qui demande beaucoup de santé et beaucoup de loisir, et je n’ai ni l’un ni l’autre.


306. — Á M. DE MONCRIF.

Il faut se lever de bon matin pour voir les princes et messieurs leurs confidents. Il n’y a pas moyen, mon cher Moncrif, que quelqu’un qui arrive à midi trouve un chat à l’hôtel de Clermont. Je venais vous faire une proposition hardie : c’était de m’aider à travailler auprès de Son Altesse, pour obtenir de lui qu’il honorât nos dîners des dimanches de sa présence,

Mme  de Fontaine-Martel disait, à ce propos :

Puisse-t-il sans cérémonie,
Au saint jour de l’Épiphanie,
Dîner avec les Arts dont lui seul est l’appui !
Ah ! s’il venait dans cet asile,
Nous ferions plus de cas d’un prince tel que lui
Que des trois rois de l’Évangile.

Voilà ce que nous chantions, madame la baronne et moi, chétif. Mais comment faire pour obtenir cette faveur ? Ce n’est pas mon affaire, c’est la vôtre,


Principibus placuisse viris, non ultima laus est.

(Hor., lib. I, ep. xvii, v. 35.)
  1. Henri Pemberton, auteur de A View of sir Isaac Newton’s Philosophy, 1728, in-8o. Cet ouvrage est une explication claire et précise de la philosophie de Newton, selon Voltaire, qui conseilla vainement à Thieriot de le traduire. (Cl.)