Cependant, mon cher ami, votre cœur a mieux réussi que le reste, et l’on est beaucoup plus content de vos bergers que de vos héros. Notre ami Formont, qui n’a point de tragédie à faire jouer, vous aura mandé plus au long des nouvelles de Daphnis et d’Antoine. Pour moi, qui cours risque d’être sifflé mercredi prochain[1], et qui vais faire répéter Ériphyle dans l’instant, je ne puis que me recommander à Dieu, et me taire sur les vers des autres.
Je voudrais que vous raccommodassiez votre besogne à Paris, et moi la mienne ; mais, comme probablement vous en avez de plus agréable à Rouen, je vous dirai seulement : Felices quibus ista licent[2]. Cependant, quand vous voudrez avoir du relâche et venir à Paris, j’espère, mon cher ami, pouvoir vous procurer non-seulement un appartement, mais une vie assez commode. C’est une affaire que j’ai dans la tête. Vous m’avez accoutumé à vivre avec vous, et il faut que j’y revive.
Adieu : je vous embrasse tendrement. Plura alias.
Madame, mon petit voyage à Arcueil m’a tourné la tête. Je croyais n’aimer que la solitude, et je sens que je n’aime plus qu’à vous faire ma cour. Au moins, si je suis destiné à vivre en hibou, je ne veux me retirer que dans les lieux que vous aurez habités et embellis. Je supplie donc Votre Altesse et M. le prince de Guise de donner à votre concierge ordre de me recevoir à Arcueil. Il faudra que je sois bien malheureux si de là je ne vais pas vous faire ma cour à Monjeu.
Je viens de faire, dans le moment, une infidélité à la maison de Lorraine. Voici un prince[3] du sang pour qui j’ai rimé, ce matin, un petit madrigal. Il mériterait mieux, car il m’a enchanté. Comment, madame ! il est aimable comme s’il n’était qu’un particulier.
Non : je n’étais point fait pour aimer la grandeur ;
Tout éclat m’importune et tout faste m’assomme ;
Mais Clermont, malgré moi, subjugue enfin mon cœur :
Je crois n’y voir qu’un prince, et j’y rencontre un homme.