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ANNÉE 1723.

quelquefois de vos nouvelles et de nous en mander un peu de la république des lettres. Mme  de Bernières et Thieriot vous font mille compliments. Je crois que vous n’avez pas besoin que je vous fasse de nouvelles protestations d’estime et d’amitié. Regardez-moi toujours comme l’homme du monde qui vous est le plus tendrement attaché. Dites, je vous en prie, à M. d’Argenson[1], que je suis bien ennuyé de le voir lieutenant de police. J’ai pourtant besoin de lui, car il faudra qu’il mette bientôt son nom au bas de Mariamne. J’ai encore plus besoin de son approbation que de sa signature.

Je travaille ici jour et nuit à mériter la vôtre. Si vous savez ce qui se passe dans la république comique, vous me ferez grand plaisir de me le mander, car j’ai extrêmement envie de prendre de justes mesures pour que Mariamne soit jouée cet hiver. On dit qu’Inès est furieusement enlaidie sur le papier. La joue-t-on encore ? La rejouera-t-on cet hiver ? Crébillon n’a-t-il point quelque échafaud à faire représenter pour la Saint-Martin ? Instruisez-moi de tout cela, et aimez-moi comme je vous aime. Adieu.



96. — À M. DE MONCRIF[2].

À la Rivière, ce 23 septembre.

Je viens d’écrire à M. d’Argenson sur ses sceaux[3]. Je vous suis infiniment obligé de l’attention que vous avez eue de me mander une nouvelle aussi intéressante pour moi. Vous me donnez tous les jours des preuves de votre amitié, qui augmentent ma reconnaissance, mais qui ne peuvent pas augmenter mon goût pour vous. J’ai envoyé Mariamne à Mlle  Lecouvreur. Elle m’a dit que vous souhaitiez être à la lecture au foyer de la Comédie. Je vous remercie de tout mon cœur de ce que vous voulez bien l’entendre. Ce n’est qu’une ébauche imparfaite ; les vers ne sont point faits, et cela ne vous fera pas grand plaisir ; mais vous m’en ferez beaucoup de me dire votre avis et de me mander l’effet que vous croyez qu’elle fera, lorsqu’elle sera travaillée. Je vous supplie de m’envoyer la critique d’Inès, dont vous me parlez. Adieu, mon cher ami ; je vous aime de tout mon cœur.

  1. C’est le comte d’Argenson, deuxième fils de Marc-René d’Argenson. Il avait été un des camarades de Voltaire au collège Louis-le-Grand.
  2. Éditeurs, de Cayrol et François.
  3. Le 20 septembre, le comte d’Argenson avait été nommé chancelier du duc d’Orléans.