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Il y a cette différence… entre le poëte dramatique et l’orateur, que celui-ci peut étaler son art… et que l’autre doit le cacher.

Grande règle, toujours observée par Racine et par Molière, rarement par d’autres. Il faut au théâtre, comme dans la société, savoir s’oublier soi-même. Corneille, qui aimait à disserter, rend quelquefois ses personnages trop dissertateurs ; et, surtout dans ses dernières pièces, il met le raisonnement à la place du sentiment.

La diction dépend de la grammaire.

Oui, et encore plus du génie, témoin les beaux vers de Corneille dans ses premières tragédies.

Le retranchement que nous avons fait des chœurs a retranché la musique de nos poëmes. Une chanson y a quelquefois bonne grâce.

Cela fut écrit avant que l’opéra fût à la mode en France. Depuis ce temps il s’est fait de grands changements. La musique s’est introduite avec beaucoup de succès dans de petites comédies, et ce nouveau genre de spectacle a pris le nom d’opéra-comique.

Je n’ai plus qu’à parler des parties de quantité, qui sont le prologue, l’épisode, l’exode, et le chœur, etc.

Il est difficile d’appliquer à notre usage le prologue, l’épisode, l’exode et le chœur des Grecs ; les Anglais ont un prologue et un épilogue, qui sont deux petites pièces de vers détachées dans la première, on demande l’indulgence des spectateurs pour la tragédie ou la comédie qu’on va jouer ; dans la seconde, on fait des plaisanteries, et surtout des allusions à tout ce qui a pu, dans la pièce, avoir quelque rapport aux mœurs de la nation et aux aventures de Londres. C’est une espèce de farce récitée par un seul acteur. Cette facétie n’est pas admise en France, et pourra l’être tant on aime, depuis quelque temps, à prendre les modes anglaises.

[Il faut] qu’il n’entre aucun acteur dans les actes suivants, qu’il ne soit connu par le premier… Cette maxime est nouvelle et assez sévère, et je ne l’ai pas toujours gardée.

Cette maxime nouvelle, établie par Corneille, était très-judicieuse. Non-seulement il est utile, pour l’intelligence parfaite d’une pièce de théâtre, que tous les personnages essentiels soient annoncés dès le premier acte, mais cette sage précaution con-