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à la loi mosaïque, qui n’en parla jamais. Ce qui peut paraître très singulier aux chrétiens intolérants de nos jours, s’il en est encore, c’est qu’on ne voit pas que les pharisiens et les saducéens, en différant si essentiellement, aient eu entre eux la moindre querelle. Ces deux sectes rivales vivaient en paix, et avaient également part aux honneurs de la synagogue.

Les esséniens étaient des religieux dont la plupart ne se mariaient point, et qui vivaient en commun ; ils ne sacrifiaient jamais de victimes sanglantes ; ils fuyaient non seulement tous les honneurs de la république, mais le commerce dangereux des autres hommes. Ce sont eux que Pline l’Ancien appelle une nation éternelle dans laquelle il ne naît personne.

Les thérapeutes juifs, retirés en Égypte auprès du lac Moeris, étaient semblables aux thérapeutes des Gentils ; et ces thérapeutes étaient une branche des anciens pythagoriciens. Thérapeute signifie serviteur et médecin. Ils prenaient ce nom de médecin, parce qu’ils croyaient purger l’âme. On nommait en Égypte les bibliothèques la médecine de l’âme, quoique la plupart des livres ne fussent qu’un poison assoupissant. Remarquons, en passant, que chez les papistes les révérends pères carmes ont gravement et fortement soutenu que les thérapeutes étaient carmes pourquoi non ? Élie, qui a fondé les carmes, ne pouvait-il pas aussi aisément fonder les thérapeutes ?

Les judaïtes avaient plus d’enthousiasme que toutes ces autres sectes. L’historien Josèphe nous apprend que ces judaïtes étaient les plus déterminés républicains qui fussent sur la terre. C’était à leurs yeux un crime horrible de donner à un homme le titre de mon maître, de mylord. Pompée et Sosius, qui avaient pris Jérusalem l’un après l’autre, Antoine, Octave, Tibère, étaient regardés eux comme des brigands dont il fallait purger la terre. Ils combattaient contre la tyrannie avec autant de courage qu’ils en parlaient. Les plus horribles supplices ne pouvaient leur arracher un mot de déférence pour les Romains, leurs vainqueurs et leurs maîtres ;leur religion était d’être libres.

Il y avait déjà quelques hérodiens, gens entièrement opposés aux judaïtes. Ceux-là regardaient le roi Hérode, tout soumis qu’il était à Rome, comme un envoyé d’Adonaï, comme un libérateur, comme un messie ; mais ce fut après sa mort que la secte hérodienne devint nombreuse. Presque tous les Juifs qui trafiquaient dans Rome, sous Néron, célébraient la fête d’Hérode leur messie. Perse[1]

  1. Satire v, vers 180 et suiv.