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376 REMARQUES SUR POLYEUCTE.

SCÈNE II.

Vers 7. Mais enfin il le faut.

Voih'i trois fois de suite il le faut. Cette inadvertance n'ôte rien à l'intérêt qui commence à naître dès la première scène ; et quoique le style soit souvent incorrect et négligé, il est toujours au-dessus de son siècle.

Vers 'lo. Ne craignez rien de mal pour une heure d'absence est encore du style comique.

SCÈNE III.

Vers 0. Tu vois, ma Stralonice, en quel siècle nous sommes. Voilà notre pouvoir sur les esprits des hommes.

Ces deux vers sentent la comédie. Le ])eu de rimes de notre langue fait que, pour rimer à hommes, on fait venir comme on peut le siècle où nous sommes, l'état oie nous sommes, tous tant que nous sommes.

Cette gêne ne se fait que trop sentir en mille occasions, et c'est une des preuves de la prodigieuse supériorité des langues grecque et latine sur les langues modernes. La seule ressource est d'éviter, si l'on peut, ces malheureuses rimes, et de chercher un autre tour : la difficulté est prodigieuse ; mais il la faut vaincre.

Vers 11. Mais après l'hyménée ils sont rois à leur tour.

Ce vers a passé en proverbe. Il n'est pas, à la vérité, de la haute tragédie ; mais cette naïveté ne peut déplaire.

Et tragicus plerumque dolct sermone pedestri ^

Il y a ici une remarque bien plus importante à faire. Il s'agit de la vie de Polyeucte. Pauline croit que le fanatique Néarque va livrer son mari aux mains des assassins, et elle s'amuse à dire : Voilà notre j)OUVoir sur les Jiommes dans le sicclo où nous som- mes, etc. Si elle est réellement si effrayée, si elle craint pour la vie de Polyeucte, c'est de cette crainte qu'elle devait d'abord par- ler : elle devait même la confier à son mari, et ne pas attendre son départ pour raconter son rêve à une confidente.

1. Horace, Art poéthiue, 93.

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