Page:Voltaire - Œuvres complètes Garnier tome31.djvu/287

Cette page n’a pas encore été corrigée

ACTE I, SCÈNE I. 277

mont un vers pour le sens, un autre pour la rime, comme il est dit dans îludibms * :

For on(> for sensé and one for rime, 1 tliink sufficient at a time.

C'est assez, pour des vers méchants, Qu'un pour la rime, un pour le sens- Vers 59. Et se laissant ravir à l'amour maternelle,

Ses vœux seront pour toi si tu n'es plus contre elle.

Cette phrase est équivoque et n'est pas française. Le mot de ravir, quand il signifie joie, ne prend point un datif. On n'est point ravi à quelque chose; c'est un solécisme de phrase.

Vers 6t. Ce discours me surprend, vu que depuis le temps Qu'on a contre son peuple armé nos combattants...

Ce vu que est une expression peu noble, même en prose ; s'il y en avait beaucoup de pareilles, la poésie serait basse et ram- pante; mais jusqu'ici vous ne trouvez guère que ce mot indigne du style de la tragédie.

Vers 68. Comme si notre Rome eût fait toutes vos craintes.

On ne fait pas une crainte, on la cause, on l'Inspire, on l'ex- cite, on la fait naître.

Vers 69. Tant quon ne s'est choqué qu'en de légers combats, Trop foibles pour jeter un des partis à bas... Oui, j'ai fait vanité d'être toute Romaine.

Jeter à bas est une expression familière qui ne serait pas même admise dans la prose. Corneille, n'ayant aucun rival qui écrivît avec noblesse, se permettait ces négligences dans les petites choses, et s'abandonnait à son génie dans les grandes.

Vers 7o. Et si j'ai ressenti dans ses destins contraires

Quelque maligne joie en faveur de mes frères...

Soudain pour l'étouffer rappelant ma raison.

J'ai pleuré quand la gloire entroit dans leur maison.

La joie des succès de sa patrie et d'un frère peut-elle être appelée maligne? Elle est naturelle; on pouvait dire : une secrHc joie en faveur de mes frères.

1. Poème anglais, de Butler, analogue à Don Quichotte.

�� �