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REMARQUES SUR MÉDÉE.

Hâtez-vous d’obéir quand ma voix vous appelle.
Que l’affreux désespoir, que la rage cruelle,
Prennent soin de vous rassembler :
Sortez, ombres, sortez de la nuit éternelle...
Venez, peuple infernal, venez;
Avancez, malheureux coupables,
Soyez aujourd’hui déchaînés;
Goûtez l’unique bien des cœurs infortunés.
Ne soyez pas seuls misérables.....
Ma rivale m’expose à des maux effroyables :
Qu’elle ait part aux tourments qui vous sont destinés.
Tous les enfers impitoyables
Auront peine à former des horreurs comparables
Aux troubles qu’elle m’a donnés.
Goûtons l’unique bien des cœurs infortunés,
Ne soyons pas seuls misérables.

Ce seul couplet vaut mieux, peut-être, que toute la Médée de Sénèque, de Corneille, et de Longepierre, parce qu’il est fort et naturel, harmonieux et sublime. Observons que c’est là ce Quinault que Boileau affectait de mépriser, et apprenons à être justes[1].

Vers 80. Avant que sur Créuse ils agiraient sur moi.

Cette suivante, qui craint la brûlure, et qui refuse de porter la robe, est très-comique, et fournirait de bonnes plaisanteries. Il était fort aisé d’envoyer la robe par un domestique qui ne fût pas instruit du poison qu’elle renfermait.


Scène III.


Vers 1. Nous devons bien chérir cette valeur parfaite, etc.

On voit combien Pollux est inutile à la pièce; Corneille l’appelle un personnage protatique.


Scène IV.


Vers 20. J’eus toujours pour suspects les dons des ennemis.

Ce vers est la traduction de ce beau vers de Virgile[2]:

  .  .  .  .  .  .  Timeo Danaos, et dona ferentes.
  1. Ce qu’on vient de lire se retrouve presque eu entier dans la lettre à Duclos du 25 décembre 1761.
  2. .En., II, 49.