d’inutile; instruire l’esprit et remuer le cœur; être toujours éloquent en vers, et de l’éloquence propre à chaque caractère qu’on représente ; parler sa langue avec autant de pureté que dans la prose la plus châtiée, sans que la contrainte de la rime paraisse gêner les pensées; ne se pas permettre un seul vers ou dur, ou obscur, ou déclamateur : ce sont là les conditions qu’on exige aujourd’hui d’une tragédie pour qu’elle puisse passer à la postérité avec l’approbation des connaisseurs, sans laquelle il n’y a jamais de réputation véritable.
On verra comment, dans les pièces suivantes, Pierre Corneille a rempli plusieurs de ces conditions.
On se contentera d’indiquer, dans cette pièce de Médée, quelques imitations de Sénèque, et quelques vers qui annoncent déjà le grand Corneille ; et on entrera dans plus de détails quand il s’agira de pièces dont presque tous les vers exigent un examen réfléchi.
ÉPITRE DÉDICATOIRE
DE CORNEILLE À MONSIEUR P. T. N. G.
Je vous donne Médée, toute méchante qu’elle est, etc.
Je n’ai pu découvrir qui est ce monsieur P. T. N. G. à qui Corneille dédie Médée. Mais il est assez utile de voir que l’auteur condamne lui-même son ouvrage.
Cette dédicace fut faite plusieurs années après la représentation. Il était alors assez grand pour avouer qu’il ne l’avait pas toujours été.
Dans la portraiture, il n’est pas question si un visage est beau, mais s’il ressemble.
Portraiture est un mot suranné, et c’est dommage : il est nécessaire ; portraiture signifie l’art de faire ressembler; on emploie aujourd’hui portrait pour exprimer l’art et la chose. Portraire est encore un mot nécessaire que nous avons abandonné.
Et dans la poésie, il ne faut pas considérer si les mœurs sont vertueuses, mais si elles sont pareilles à celles de la personne qu’elle introduit.