Page:Voltaire - Œuvres complètes Garnier tome31.djvu/17

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

le plus médiocre. Descartes eût été le meilleur écolier de Galilée s’il eût pu étudier sous lui. V.

VIII. — J’ajouterais volontiers à cette maxime (de Zoroastre : Dans le doute abstiens-toi) : Si tu as quelque intérêt à agir ; mais si tu n’en as point, agis, de peur que la paresse ou l’indifférence pour le bien ne soient la cause secrète de ton doute. C.

Votre petit commentaire sur Zoroastre est juste et beau. Dites-moi comment on put imputer tant d’horribles extravagances à un législateur qui avait dit : Dans le doute abstiens-toi ? Quelle sublimité dans les maximes des brachmanes, de Pythagore, leur disciple, de Zaleucus, quelquefois même de Platon ! Mais nous avons des casuistes. V.

IX. — (En note.) Ils (les casuistes) demandent quelle espèce de péché il y a à coucher avec le diable ; si le sexe sous lequel le diable juge à propos de paraître change l’espèce du péché. Ils répondent que non, mais qu’il y a complication ; et ils appellent cette espèce bestialité, quoique le diable ne soit pourtant pas si bête. Ainsi, lorsque le diable prend la forme d’une religieuse, il y a bestialité avec complication d’inceste spirituel. Ils demandent si une religieuse qui donne un rendez-vous à son amant sur la brèche du monastère, et qui a la précaution de n’avoir hors du couvent que la moitié du corps, échappe par ce moyen au crime d’avoir violé la clôture ; si un homme qui entretiendrait cinq filles, et qui, en reconnaissance de leurs services, aurait promis de dire un Ave Maria pour chacune, pécherait en accomplissant ce vœu ou en ne l’accomplissant pas, etc.

Tout cela est fort curieux, et surtout fort important pour le bonheur de l’humanité. Cependant c’est ce qu’on a appelé longtemps et ce que, dans les écoles, on appelle encore la morale. C.

Il ne reste plus qu’à savoir combien on paya de florins par la taxe apostolique pour ces mésalliances. V.

X. — Pascal, en attaquant ces jésuites si scandaleux et si sots… C.

Sots paraît un peu trop hasardé au vulgaire, qui croit encore que tout jésuite était un fripon ; mais sots est le mot propre ; les habiles, les fins, étaient les chefs de l’ordre, Italiens résidant à Rome, espions dans toute l’Europe, sous le nom de pères spirituels, confesseurs des rois et des reines depuis qu’on cut pendu le P. Guignard. La foule des petits jésuites de collége était composée d’écoliers jeunes et vieux, argumentant à toute outrance contre calvinistes, jansénistes, rigoristes, et philosophes ; bons grammairiens en latin ; ne sachant pas un mot des secrets du père général et de son conseil. C’était parmi ceux qu’étaient les sots. V.