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Joseph, après la mort de Jacob, ordonna aux médecins ses valets de l’embaumer avec leurs aromates ; et ils employerent 40 jours à cet ouvrage. Et toute l’égypte pleura Jacob pendant soixante et dix jours. Et Joseph alla enterrer son pere dans le Canaan, avec tous les chefs de la maison du pharaon, toute sa maison et tous ses freres, accompagnés de chariots et de cavaliers en grand nombre. Et ils porterent Jacob dans la terre de Canaan ; et ils l’ensevelirent dans la caverne qu’Abraham avoit achetée d’éphron l’éthéen, vis-à-vis de Mambré [1]. Joseph revenu dans l’égypte avec toute la maison de son pere, il vit, éphraïm et les enfans d’éphraïm et ceux de Manassé son autre fils, jusqu’à la troisieme génération ; et il mourut, âgé de cent-dix ans, et on l’embauma, et on mit son corps dans un coffre en égypte [2].

    les confondre. L’auteur était inspiré ; et l’église entiere, après un mûr examen, a reçu ce livre comme sacré. (Note de Voltaire.)

  1. on voit par-là que les embaumemens, si fameux dans l’égypte, étaient en usage depuis très longtemps. La plupart des drogues qui servaient à embaumer les morts ne croissent point en égypte : il fallait les acheter des arabes, qui les allaient chercher aux Indes à dos de chameau, et qui revenaient par l’isthme de Suez les vendre en égypte pour du bled. Hérodote et Diodore rapportent qu’il y avait trois sortes d’embaumemens, et que la plus chere coutait un talent d’égypte, évalué il y a plus de cent ans à deux-mille six-cents quatre-vingts-huit livres de France, et qui par conséquent en vaudrait aujourd’hui à-peu-près le double. On ne rendait pas cet honneur au pauvre peuple. Avec quoi l’aurait-il payé ? Sur-tout dans ce temps de famine ? Les rois et les grands voulaient triompher de la mort même : ils voulaient que leurs corps durassent éternellement. Il est vraisemblable que les pyramides furent inventées dès que la maniere d’embaumer fut connue. Les rois, les grands, les principaux prêtres, firent d’abord de petites pyramides pour tenir les corps séchement dans un pays couvert d’eau et de boue pendant quatre mois de l’année. La superstition y eut encore autant de part que l’orgueil. Les égyptiens croyaient qu’ils avaient une ame, et que cette ame reviendrait animer leur corps au bout de trois mille ans, comme nous l’avons déjà dit* *Tome XI, page 65 ; XX, 361, 368 ; XXVIII, 150 ; XXIX, 178. Il fallait donc précieusement conserver les corps des grands seigneurs, afin que leurs ames les retrouvassent ; car pour les ames du peuple on ne s’en embarrasse jamais ; on le fit seulement travailler aux sépulcres de ses maitres. C’est donc pour perpétuer les corps des grands qu’on bâtit ces hautes pyramides qui subsistent encore, et dans lesquelles on a trouvé de nos jours plusieurs momies. Il est de la plus grande vraisemblance que plusieurs pyramides existaient lorsqu’on embauma Jacob ; et il est étonnant que l’auteur n’en parle pas, et qu’il n’en soit jamais fait la moindre mention dans l’écriture. Le seul Flavien Joseph, leur historien, dit que le pharaon fesait travailler les hébreux à bâtir les pyramides. (id.)
  2. non-seulement on déposait les corps dans les pyramides ; mais on les gardait longtemps dans les maisons, enfermés dans des coffres ou cercueils de bois de cedre ; ensuite on les portait dans une pyramide soit petite, soit grande. Les petites ont été détruites par le temps ; les grandes ont résisté. L’auteur de mirabilibus sacrae scripturae dit qu’on dressa une figure de veau sur le coffre où