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462 COMMENTAIRE

impie. Il ne la connaissait pas, sans doute ; elle était ensevelie dans les formules de Marcull'e, depuis le viir siècle, au fond de quelque couvent de bénédictins qui n'étaient pas si savants que les bénédictins d'aujourd'hui. Le duc de Bourgogne, Eudes, oncle maternel de Jeanne, voulut en vain soutenir les droits de sa nièce ; en vain il s'empara d'abord de la petite forteresse du Louvre, en vain il s'opposa au sacre ; le parti de Philippe le Long fut le plus puissant. Tout le monde criait: « La loi sahque ! la loi salique! » qu'on ne connaissait que par ce peu de lignes qu'on répétait si aisément: Filles n héritent point de terres saliques. Philippe le Long régna, et Jeanne fut oubliée.

Dès qu'il fut sacré, il convoqua en 1317 une grande assemblée de notables, à la tête de laquelle était un cardinal nommé d'Ara- blay. L'Université y fut appelée. Les membres laïques de cette assemblée qui savaient écrire signèrent que filles n'héritent point du royaume. Les autres firent apposer leurs sceaux à cet instru- ment authentique. Et ce qui est fort étrange, les membres de l'Université ne le signèrent point. Quoique la souscription d'une compagnie réputée alors la seule savante, et qu'on a nommée le concile perpétuel des Gaules, manquât à un acte si intéressant, il n'en fut pas moins regardé comme un loi fondamentale du royaume.

Cette loi eut bientôt son plein effet à la mort de Philippe le Long. Il ne laissait que des filles, et comme il avait succédé à son frère Louis Hutin, son frère Charles le Bel lui succéda avec l'applaudissement de la France. La mort poursuivait ces trois jeunes frères. Leurs règnes ne remplirent en tout qu'une durée de treize ans. Charles le Bel, en mourant, ne laissa encore que des filles. Sa veuve, Jeanne d'Évreux, était enceinte; il fallait nommer un régent. Le droit à cette régence fut disputé par les deux plus proches parents, le jeune Edouard III, roi d'Angle- terre, neveu des trois rois de France derniers morts, et Philippe, comte de Valois, leur cousin germain. Edouard était neveu par sa mère, et Valois était cousin par son père. L'un alléguait la proximité, l'autre sa descendance par les mâles. La cause fut jugée à Paris dans une nouvelle assemblée de notables, composée de pairs, de hauts barons, et de tout ce qui pouvait représenter la nation.

On décida, d'une voix unanime, que la mère d'Edouard n'avait pu transmettre à son fils aucun droit, puisqu'elle n'en avait pas. La cause des Anglais était bien mauvaise, mais ils disaient aux Français : Ce n'est pas à vous à décider, vous êtes

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