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SUR L'ESPRIT DES LOIS. 461

011 les aurait portées pour elle. Mais probablement elle aurait combattu à la tête de ses armées, comme ont fait notre héroïne Marguerite d'Anjou, non assez célébrée, et la magnanime com- tesse de Montfort, et tant d'autres.

On pouvait donc renoncer à la loi salique en faisant son tes- tament, comme tout citoyen peut encore aujourd'hui renoncer par son testament à la loi FalcidlaK

Pourquoi les deux ou trois lignes de la loi salique auraient- elles été si funestes aux filles des rois de France?

La France était-elle reconnue pour terre salique, pour terre du pays où coule la rivière Sala en Allemagne, ou pour terre de la Salle dans la Campine? Les filles des rois étaient-elles de pire condition que les filles des pairs de France ? La Guienne, la Nor- mandie, le Ponthicu, Montreuil, appartinrent à des femmes, et vinrent au roi d'Angleterre par des femmes. Les comtés de Tou- louse et de Provence tombèrent entre les mains des femmes sans nulle réclamation.

Philippe de ^ alois lui-même, qui combattit avec tant de mal- heur pour la loi salique, jugea en faveur du droit des femmes la cause de Jeanne, épouse de Charles de Blois, contre Montfort, et adjugea la Bretagne à Jeanne. Il décida de même le fameux pro- cès de Robert d'Artois, prince du sang, descendant par mâles d'un frère de saint Louis, contre Mahautsa tante. S'il y avait une province en France où la loi salique dut être en vigueur, c'était un des premiers cantons subjugués parles Francs-Saliens quand ils envahirent les Gaules. Cependant Philippe de Valois et sa cour des pairs donnèrent l'Artois aux femmes, et forcèrent le prince à commettre un crime de faux pour soutenir ses droits, du moins à ce qu'on dit.

Que conclure de tant d'exemples? Encore une fois, que tout est contradictoire dans les gouvernements et dans les passions des hommes.

Venons enfin à la grande querelle de Philippe de Valois et d'Edouard ILI, roi d'Angleterre.

Louis Hutin, arrière-petit-fils de saint Louis, ne laissa qu'une fiHe (je ne parle point d'un fils posthume qui ne vécut que peu de jours). Qui devait succéder à Louis Hutin? Était-ce sa fille unique Jeanne, ou son second frère Philippe le Long? Louis n'avait point employé la formule Ma chère fille, il y a une loi

l. Elle défendait au testateur Ce léguer plus des trois quarts de son bien au préjudice de l'héritier.

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