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408 COMMENTAIKE

des sources intarissables de dispute. Les deux contendants --^tournent sans avancer, comme s'ils dansaient un menuet ; ils se retrouvent à la fin tous deux au même endroit dont ils étaient partis.

Je ne chercherai point si Dieu a ses lois, ou si sa pensée, sa volonté, sont sa seule loi ; si les bêtes ont leurs lois, comme dit L'auteur ;

Ni s'il y avait des rapports de justice avant qu'il existât des hommes : ce qui est l'ancienne querelle des réaux et des nomi- naux ;

Ni si un être intelligent, créé par un autre être intelligent, et ayant fait du mal à son camarade intelligent, peut être supposé devoir subir la peine du talion, par l'ordre du Créateur intelli- gent, avant que ce Créateur ait créé;

Ni si le monde intelligent n'est pas si bien gouverné que le monde non intelligent, et pourquoi;

Ni s'il est vrai que l'homme viole les lois de Dieu en qualité (l'être intelligent, ou si plutôt il n'est pas privé de son intelligence dans l'instant qu'il viole ces lois.

Ne nousjouons point dans les subtilités de cette métaphysique; gardons-nous d'entrer dans ce labyrinthe.

II.

L'Anglais Hobbes prétend que l'état naturel de l'homme est un état de guerre, par ce que tous les hommes ont un droit égal à tout.

Montesquieu, plus doux, veut croire que l'homme n'est qu'un animal timide qui cherche la paix.

Il apporte en preuve l'histoire de ce sauvage trouvé, il y a cinquante ans, dans les forêts de Hanovre, et que le moindre bruit effrayait.

Il me semble que si l'on veut savoir comment la pure nature humaine est faite, il n'y a qu'à considérer les enfants de nos rustres. Le plus poltron s'enfuit devant le plus méchant ; le plus faible est battu par le plus fort : si un peu de sang coule, il pleure, il crie ; les larmes, les plaintes, que la douleur arrache à cette machine, font une impression soudaine sur la machine de son camarade qui le battait. Il s'arrête, comme si une puissance supérieure lui saisissait la main ; il s'émeut, il s'attendrit, il em- brasse son ennemi qu'il a blessé ; et le lendemain, s'il y a des noisettes à partager, ils recommenceront le combat ; ils sont déjà

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