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Ce qu’il faut remarquer davantage c’est l’arrivée de ces trois mages, qu’on a transformés en trois rois. L’auteur dit que l’enfant étant né du temps du roi Hérode, les mages arriverent un mois après, et demanderent : où est le nouveau-né, roi des juifs ? Car nous avons vu son étoile dans l’Anatolie, etc. »

Toute cette avanture des trois mages, ou des trois rois, a beaucoup occupé les critiques. On a recherché quelle était cette étoile ; pourquoi il n’y eut que ces trois mages qui la virent ; pourquoi ils prirent un enfant, né dans l’étable d’une taverne, pour le roi des juifs ; comment Hérode, âgé de soixante et dix ans, et qui avait autant d’expérience que de bon sens, put croire une si étrange nouvelle. On a fait sur tout cela beaucoup d’hypotheses. Des commentateurs ont dit que la chose avait été prédite par Zoroastre. On trouve dans Origene que l’étoile s’arrêta sur la tête de l’enfant-Jésus. La commune opinion fut que l’étoile se jetta dans un puits ; et on prétend que ce puits est encore montré aux pélerins qui ne sont pas astronomes. Ils devroient descendre dans ce puits ; car la verité y est.

Ces discussions occupent les savants. Il n’y a point de dispute sur la morale ; elle est à la portée des esprits les plus simples.

Il est étrange que la commémoration des trois rois et des trois mages soit parmi les catholiques un objet de culte et de dérision tout ensemble, et qu’on ne connaisse guere ce miracle que par le gâteau de la feve, et par les chansons comiques qu’on fait tous les ans[1] sur la mere et l’enfant, sur Joseph, sur le bœuf et l’âne, et sur les trois rois.

VI. Ἰδοὺ, ἄγγελος Κυρίου φαίνεται ϰατ’ ὄναρ τῷ Ἰωσὴφ, λέγων· Ἐγερθεὶς παράλαϐε τὸ παιδίον ϰαὶ τῆν μητέρα αὐτοῦ, ϰαὶ φεῦγε εἰς Αἴγυπτον.

Voilà que l’ange du Seigneur apparut à Joseph pendant son sommeil, disant : Éveille-toi, prends l’enfant et sa mère, et fuis en Egypte. (Matth., cbap. ii, V. 13.)

Ce qui a le plus embarrassé les commentateurs, c’est que ni saint Jean, ni Marc, ni Luc qui a écrit si tard, et qui dit avoir tout écrit diligemment et par ordre, non-seulement ne parle point de cette fuite en Egypte, mais que Luc dit expressément le con-

  1. Les Mémoires secrets, connus sous le nom de Bachaumont, en ont conservé une très-piquante, à la date du 31 décembre 1763. (B.)