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terons le plus succinctement qu’il sera possible. Ce que nous craignons le plus, c’est le verbiage.


Dans les jours d’Assuerus, qui régnait de l’Inde à l’éthiopie sur cent vingt-sept provinces[1], il s’assit sur son trône. Et Suze était la capitale de son empire. Il fit un grand festin à tous les princes... le festin dura cent quatre-vingt jours...[2]. ... sur la fin du repas, le roi invita tout le peuple de Suze pendant sept jours, depuis le plus grand jusqu’au plus petit... sous des voiles de couleur bleu céleste, des lits d’or et d’argent étaient rangés sur des pavés d’émeraudes…[3]. le septieme jour le roi, étant plus gai que de coutume à cause du trop de vin qu’il avait bu, commanda aux sept princes eunuques qui le servaient, de faire venir la reine Vasthi (toute nue suivant le texte chaldéen) le diadême au front, pour montrer sa beauté à tous ses peuples ; car elle était fort belle…[4]. ... le roi transporté de fureur consulta sept sages…[5]. Mamucan parla le premier, et dit :

  1. on ne sait quel était cet Assuerus. Des doctes assurent que ce nom était le titre que prenaient tous les rois de Perse ; ils s’intitulaient Achawerosh, qui voulait dire héros, guerrier, invincible ; et de cet Achawerosh les grecs firent Assuerus. Mais cette étymologie ne nous apprend pas qui était ce grand prince.
  2. les critiques obstinés, tels que les Bolingbroke, les Fréret, les Dumarsais, les Tilladet, les Mêlier, les Boulanger, etc. Traitent ce début de conte des mille et une nuits. Un festin de cent quatre-vingts jours leur paraît bien long. Ils citent la loi d’un peuple fort sobre, qui ordonne qu’on ne soit jamais plus de dix heures à table.
  3. les voiles de bleu céleste, les lits d’or et le pavé d’émeraude, leur paraissent dignes du coq d’Aboulcassem. C’est peut-être une allégorie, une figure, un type ; nous n’osons en décider.
  4. si le texte chaldéen porte que le roi voulut que sa femme parût toute nue, son ivresse semble rendre cette extravagance vraisemblable. Le commencement de cette histoire a quelque rapport avec celle de Candaule et de Gygès, racontée par Hérodote. On peut observer, que pendant le festin de cent quatre-vingts jours que le roi donnait aux seigneurs, la reine Vasthi en donnait un aussi long aux dames de Babylone. L’historien Flavien Joseph remarque, que ce n’était pas la coutume en Perse que les femmes mangeassent avec les hommes ; et que même il ne leur était jamais permis de se laisser voir aux étrangers. Cette remarque sert à détruire la fable incroyable d’Hérodote, que les femmes de Babylone étaient obligées de se prostituer une fois dans leur vie aux étrangers dans le temple de Militta. Ceux qui ont tâché de soutenir l’erreur d’Hérodote, doivent se rendre au témoignage de Flavien Joseph.
  5. des doctes ont prétendu que ces sept principaux officiers du roi de Perse