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ROIS.

LIVRE PREMIERS.

… les enfans d’Héli grand-prêtre étaient des enfans de Bélial qui ne connaissaient point le seigneur, et qui violaient le devoir des prêtres envers le peuple ; car qui que ce fût qui immolât une victime, un valet de prêtre venait pendant qu’on cuisait la chair, tenant à la main une fourchette à trois dents, il la mettait dans la chaudiere, et tout ce qu’il pouvait enlever était pour le prêtre… et si celui qui immolait, lui disait : fesons d’abord brûler la graisse comme de coutume, et puis tu prendras de la viande autant que tu en voudras ; le valet répondait : non tu m’en donneras à présent, ou j’en prendrai par force…[1]. Or Héli était très-vieux ; et il apprit que ses fils fesaient toutes ces choses, et qu’ils couchaient avec toutes les femmes qui venaient à la porte du tabernacle… or le jeune Samuel servoit le seigneur auprès du grand-prêtre Héli… la parole du seigneur était alors très-rare, et il n’y avait point de grande vision… il arriva un certain jour qu’Héli couchait dans son lieu ; ses yeux étaient obscurcis, et il ne pouvait voir…[2].

  1. on ne sait pas quel est l’auteur du livre de Samuel. Le grand Newton croit que c’est Samuel lui-même ; qu’il écrivit tous les livres précédens, et qu’il y ajouta tout ce qui regarde le grand-prêtre Héli et sa famille. Newton, qui avait étudié d’abord pour être prêtre, savait très bien l’hébreu ; il était entré dans toutes les profondeurs de l’histoire orientale : son systême cependant n’a paru qu’une conjecture. Si Samuel n’a pas écrit une partie de ce petit livre, c’est sans doute quelque lévite qui lui était très attaché. Le savant Fréret reproche à l’auteur, quel qu’il soit, un défaut dans lequel aucun historien de nos jours ne tomberait : c’est de laisser le lecteur dans une ignorance entiere de l’état où étoit alors la nation. Il est difficile de savoir quel est le lieu de la scene, quelle étendue de pays possédaient alors les juifs, s’ils étaient encore esclaves ou simplement tributaires des phéniciens nommés philistins. L’auteur paraît être un prêtre, qui n’est occupé que de sa profession, et qui compte tout le reste pour peu de chose. Nous pensons qu’il y avait alors quelques tribus esclaves vers le nord de la Palestine ; et d’autres, vers le midi, seulement tributaires, comme celle de Juda, qui était la plus considérable, et celle de Benjamin, réduite à un très petit nombre : il nous semble que les juifs ne possédaient pas encore une seule ville en propre.
  2. l’auteur ne nous dit point où résidait ce grand-prêtre Héli, que les phéniciens