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486 L’ENFANT PRODIGUE.

Pourquoi ces yeux de gens qu’on exorcise ’, Et ces sanglots coup sur coup redoublés,- Pressant tes mots au passage étranglés ?

EUPHÉMON FILS.

Ah ! je ne puis contenir ma tendresse ;

Je cède au trouble, au remords qui me presse.

JASMIN.

Qu’a-t-ellc dit qui t’ait tant agité ?

EUPHÉMON FILS.

Elle m’a dit… Je n’ai rien écouté.

JASMIN.

()u’avez-vous donc ?

EL’PHÉMON FILS.

Mon cœur ne peut se taire : Cet Eupliémon…

JASMIN.

Eh bien ?

EUPHÉMON FILS.

Ah ! ,., c’est mon père.

JASMIN.

Qui ? lui, monsieur ?

EUPHÉMON FILS.

Oui, je suis cet aîné, Ce criminel, et cet infortuné, Qui désola sa famille éperdue. Ah ! que mon cœur palpitait à sa vue ! Qu’il lui portait ses vœux humiliés ! Que j’étais prêt de tomber à ses pieds !

JASMIN.

Qui ? vous, son fils ? ah ! pardonnez, de grâce, Ma familière et ridicule audace ; Pardon, monsieur,

EUPHÉMON FILS.

Va, mon cœur oppressé Peut-il savoir si tu m’as offensé ?

1. Le mot exorcise ayant choqué la police, les comédiens y substituèrent tym- panise : et Voltaire, mécontent de ce changement, disait de remplacer ce vers et le précédent par :

S’il te plaît, quel accès de folie ! . Pourquoi ces yeux, cet air de gens qu’on lie ?

Mais on laissa, en 1738, imprimer la version qu’on avait défendu de réciter en 173G. (B.)