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Dans ton sang odieux pourrait venger la terre :
Et j’aurais les mortels et les dieux pour amis,
En révérant le père et punissant le fils.

Alvarès à Gusman.

De ce discours, ô ciel, que je me sens confondre !
Vous sentez-vous coupable, et pouvez-vous répondre ?

Gusman.

Répondre à ce rebelle et daigner m’avilir,
Jusqu’à le réfuter, quand je le dois punir ?
Son juste châtiment, que lui-même il prononce,
Sans mon respect pour vous, eût été ma réponse.

à Alzire,

Madame, votre cœur doit vous instruire assez,
À quel point en secret ici vous m’offensez ;
Vous, qui, sinon pour moi, du moins pour votre gloire,
Deviez de cet esclave étouffer la mémoire :
Vous, dont les pleurs encore outragent votre époux,
Vous, que j’aimais assez pour en être jaloux.

Alzire à Gusman,

Cruel !

à Alvarès,

Et vous, seigneur ! Mon protecteur son père,

à Zamore,

Toi ! Jadis mon espoir en un temps plus prospère,
Voyez le joug horrible où mon sort est lié,
Et frémissez tous trois d’horreur et de pitié.

(en montrant Zamore,)

Voici l’amant, l’époux que me choisit mon père,
Avant que je connusse un nouvel hémisphère,
Avant que de l’Europe on nous portât des fers,
Le bruit de son trépas perdit cet univers.
Je vis tomber l’empire où régnaient mes ancêtres,
Tout changea sur la terre, et je connus des maîtres.
Mon père infortuné, plein d’ennuis et de jours,
Au dieu que vous servez eut à la fin recours :
C’est ce dieu des chrétiens, que devant vous j’atteste,
Ses autels sont témoins de mon hymen funeste.