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35(5 LA MORT DH CÉSAR.

Dos dépouilles du monde il couronnait vos têtes. Tout For des nations qui tombaient sous ses coups, Tout le |)rix de son sang fut prodigué pour vous. De son char de triomphe il voyait vos alarmes : César en descendait pour essuyer vos larmes. Du monde qu’il soumit vous triomphez en paix, Jouissants par son courage, heureux par ses bienfaits. 11 payait le service, il pardonnait l’outrage. Vous le savez, grands dieux ! vous dont il fut l’image ; Vous, dieux, qui lui laissiez le monde k gouverner. Vous savez si son cœur aimait à pardonner !

ROMAINS.

11 est vrai que César fit aimer sa clémence.

ANTOINE.

Hélas ! si sa grande âme eût connu la vengeance, 11 vivrait, et sa vie eût rempli nos souhaits. Sur tous ses meurtriers il versa ses bienfaits ; Deux fois à Cassius il conserva la vie. Brutus… où suis-je ? ô ciel ! ô crime ! ô barbarie ! Cliers amis, je succombe ; et mes sens interdits… Brutus, son assassin !… ce monstre était son fils.

ROMAINS.

Ah, dieux !

ANTOINE.

Je vois frémir vos généreux courages ; Amis, je vois les pleurs qui mouillent vos visages. Oui, Brutus est son fils ; mais vous qui m’écoutez. Vous étiez ses enfants dans son cœur adoptés. Hélas ! si vous saviez sa volonté dernière !

ROMAINS.

Quelle est-elle ? parlez.

ANTOINE,

Rome est son héritière. Ses trésors sont vos biens ; vous en allez jouir : Au delà du tombeau César veut vous servir. C’est vous seuls qu’il aimait ; c’est pour vous qu’en Asie Il allait prodiguer sa fortune et sa vie. « Romains, disait-il, peuple-roi que je sers. Commandez à César, César à l’univers. » Brutus ou Cassius eût-il fait davantage ?

ROMAINS.

Ah ! nous les détestons. Ce doute nous outrage.