ACTE II, SCÈNE IV. 337
Dans uno heure un tyran détruit le nom romain,
BRl.TL’S,
Dans une heure à César il faut percer le sein.
CASSIL’S.
Ail ! je te reconnais à cette noble audace.
DÉCIME.
Knnemi des tyrans, et digne de ta race,
\ oilà les sentiments que j’avais dans mon cœur.
CASSIUS.
Tu me rends à moi-même, et je t’en dois l’honneur ; C’est là ce qu’attendaient ma liaine et ma colère De la mâle vertu qui fait ton caracti’re. C’est Rome qui t’inspire en des desseins si grands : Ton nom seul est l’arrêt de la mort des tyrans. Lavons, mon cher Brutus, l’opprobre de la terre ; Vengeons ce Capitolc, au défaut du tonnerre. Toi, Cimber ; toi, Cinna ; vous, Romains indomptés, Avez-vous une autre àme et d’autres volontés ?
CIMBER,
Nous pensons comme toi, nous méprisons la vie : Nous détestons César, nous aimons la patrie ; Nous la vengerons tous : Brutus et Cassius De quiconque est Romain raniment les vertus.
DÉCIME,
Nés juges de l’État, nés les vengeurs du crime. C’est souffrir trop longtemps la main qui nous opprime ; fit quand sur un tyran nous suspendons nos coups. Chaque instant qu’il respire est un crime pour nous.
CIMBER,
Admettons-nous quelque autre à ces honneurs suprêmes ?
BRUTUS.
Pour venger la patrie il suffit de nous-mêmes’. Dolabella, Lépide, Emile, Bibulus, Ou tremblent sous César, ou bien lui sont vendus, Cicéron, qui d’un traître a puni l’insolence ^
1. M, A. Lacroix remarque avec raison que cette délibération de conjurés était un immense progrès dramatique. Les faits remplacent les récits. (G, A,)
2, C’est ainsi que Brutus devait penser de Cicéron. Ce portrait d’ailleurs est conforme à l’histoire ; il y avait loin de Gatilina à César ; il fallait alors un autre courage et d’autres vertus. Ce vers,
Hardi dans lo sénat, faible dans le danger, est très-vrai, non que Cicéron manquât de courage personnel, mais son courage Théâtre. II. 22