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JÉRÔME, au comte.

Demeure là.

LE COMTE.

Qu’est-ce à dire ?

MARTIN, de l’autre côté.

Demeure ici.

LE COMTE.

Mais, mais, qu’est-ce que c’est que ça ? qu’est-ce que c’est que ça ? où est donc le respect ? (Les gens du baron saisissent l’épée du comte, et le garrottent.) Comment ! comment ! vous me désarmez !… Ahi ! ahi ! vous me serrez trop fort. Attendez donc ; vous allez gâter toute ma broderie. (Au baron.) Baron, vous me paraissez un fou un peu violent : n’avez-vous jamais de bons intervalles ?

LE BARON.

Je n’ai jamais vu un drôle si impudent.

LE COMTE.

Pour peu qu’il vous reste un grain de raison, ne sauriez-vous me dire comment la tête vous a tourné, pourquoi vous traitez ainsi le comte votre gendre ?

GOTTON, sortant du château, et s’approchant du comte.

Que je voie donc comment sont faits ceux qui veulent m’enlever. Ah ! fi ! pouah ! il m’empuantit d’odeurs ; j’en aurai mal à la tête pendant quinze jours. Ah ! le vilain homme !

LE COMTE.

Beau-père, au goût que cette personne-là me témoigne, il y a apparence que c’est ma femme… Mais, baron, me tiendrez-vous longtemps dans cette posture, et ne pourrai-je m’expliquer ? N’attendez-vous pas le comte de Fatenville avec une lettre de votre ami Trigaudin ?

LE BARON.

Oui, coquin, oui.

LE COMTE.

Ne m’injuriez donc pas, s’il vous plaît ; je vous ai déjà dit que j’ai l’honneur d’être M. le comte de Fatenville ; et j’ai la lettre du sieur Trigaudin dans ma poche ; fouillez plutôt.

LE BARON.

Je reconnais mes fripons : ils ne sont jamais sans lettres en poche. Prenons toujours la lettre ; il sera puni comme ravisseur et comme faussaire.

LE COMTE.

Ce baron est une espèce de beau-père bien étrange.