214 LE DUC DE FOIX.
Je t’admire avec honte, il le faut avouer.
- Mon cœur…
LISOIS.
Aimez-moi, prince, au lieu de me louer ;
- Et si vous me devez quel([ue reconnaissance,
- Faites votre bonheur, il est ma récompense.
- ^ous voyez quelle ardente et fière inimitié
♦Votre frère nourrit contre votre allié :
La suite, croyez-moi, peut en être funeste ;
Vous êtes sous un joug que ce peuple déteste.
Je prévois que bientôt on verra réunis
- Les débris dispersés de l’empire des lis.
Chaque jour nous produit un nouvel adversaire ;
Hier le Béarnais, aujourd’hui votre frère.
- Le pur sang de Clovis est toujours adoré ;
- Tôt ou tard il faudra que de ce tronc sacré
- Les rameaux divisés et courbés par l’orage,
- P]us unis et plus beaux, soient notre unique ombrage.
Vous, placé près du trône, à ce trône attaché,
Si les malheurs du temps vous en ont arraché,
A des nœuds étrangers s’il fallut nous résoudre,
L’intérêt qui les forme a droit de les dissoudre.
On pourrait ])alancer avec dextérité
Des maires du palais la fière autorité ;
Et bientôt par vos mains leur puissance affaiblie…
LE DUC.
Je le souhaite au moins ; mais crois-tu qu’Amélie
- Dans son cœur amolli partagerait mes feux,
- Si le même parti nous unissait tous deux ?
- Penses-tu qu’à m’aimer je pourrais la réduire ?
LISOIS.
- Dans le fond de son cœur je n’ai point voulu lire ;
- Mais qu’importent pour vous ses vœux et ses desseins ?
- Faut-il que l’amour seul fasse ici nos destins ?
Lorsque le grand Clovis, aux champs de la Touraine, Détruisit les vainqueurs de la grandeur romaine ;
- Quand son bras arrêta, dans nos champs inondés,
♦Des Ariens sanglants les torrents débordés,
- Tant d’honneurs étaient-ils l’effet de sa tendresse ?
- Sauva-t-il son pays pour plaire à sa maîtresse ?
Mon bras contre un rival est prêt à vous servir ;
- Je voudrais faire plus, je voudrais vous guérir.