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112 ADELAÏDE DU GL’ESCLIN.

Qu’il ait ])osoin de moi pour être vertueux. Vos desseins ont sans doute une source plus pure : Vous avez consulté le devoir, la nature : —--L’amour a peu de part où doit régner l’iionneur.

VENDÔME.

L’amour seul a tout fait, et c’est là mon malheur ; Sur tout autre intérêt ce triste amour l’emporte. Accablez-moi de honte, accusez-moi, n’importe ! Dussé-je vous déplaire et forcer votre cœur, L’autel est prêt ; venez.

NEMOLHS.

Vous osez ?…

ADÉLAÏDE.

^on, seigneur. Avant que je vous cède, et que l’hymen nous lie, Aux yeux de votre frère arrachez-moi la vie. Le sort met entre nous un o])stacle éternel. Je ne puis être à vous.

VENDÔME.

Xemours… ingrate… Ah ciel ! C’en est donc fait… mais non… mon cœur sait se contraindre Vous ne méritez pas que je daigne m’en plaindre. Vous auriez dû peut-être, avec moins de détour. Dans ses premiers transports étouffer mon amour. Et par un prompt aveu, (jui m’eût guéri sans doute, .M’épargner les affronts que ma ]jont( me coûte. Mais je vous rends justice ; et ces séductions, Qui vont au fond des cœurs chercher nos passions, L’espoir ([u’on donne k peine afin qu’on le saisisse. Ce poison préparé des mains de l’artifice. Sont les armes d’un sexe aussi trompeur que vain, Que l’œil de la raison regarde avec dédain. Je suis libre par vous : cet art que je déteste. Cet art qui m’enchaîna brise un joug si funeste ; Et je ne prétends pas, indignement épris, Rougir devant mon frère, et souffrir des mépris. ’\[oi)trez-moi seulement ce rival qui se cache ; Je lui cède avec joie un poison qu’il m’arrache’ ;

1. Il y a dans la Siplionisbe de Coraoillc (acte IV, scène ii) : Je lui cède avec joie un poison qu’il me vole.