M. Linguet, défenseur de M. le comte de Morangiés, affirme, dans son résumé, que ce M. Aubourg a volé un étui d’or qu’il a été obligé de rendre. Il reproche à cet homme d’honneur cent autres traits pareils. Il assure qu’il a des preuves que cet Aubourg, instigateur de toute cette infâme affaire, commandait publiquement des pâtés qu’il envoyait au bailliage pendant l’instruction du procès[1] : de sorte qu’au fond on voit un voleur et un receleur protégés par M. Pigeon contre vous, messieurs, et contre l’opinion du roi.
Les avocats attestaient Dieu, devant qui la veuve Véron avait fait son testament après avoir communié. Elle ne pouvait pas tromper Dieu, disaient-ils. — Non, mais elle pouvait tromper les hommes ; ou plutôt on se servait d’elle pour les tromper très-grossièrement, en lui faisant dire qu’au lieu de trois cent mille livres qu’elle assura tant de fois composer tout son bien, elle avait possédé cinq cent mille livres. On la faisait mentir dans ce testament comme elle avait menti pendant sa vie.
Ces avocats fondaient leurs plaidoyers sur le témoignage de personnages dignes de foi qui avaient déposé pour les Véron. Mais qui étaient ces témoins irréprochables ? Une femme infâme, enfermée plusieurs fois à l’Hôpital ; son filleul, commis des fermes et chassé ; un cocher, l’ami de Du Jonquay, qui déposaient des choses absurdes, incroyables, impossibles. Cent dépositions de cette espèce ne pèsent pas le témoignage d’un honnête homme. C’est assez de deux témoins, quand ce sont des hommes de bien qui s’accordent sur des faits vraisemblables ; mais la foule d’une canaille qui dépose des faits dont le seul récit choque la raison, et qui se contredit sur presque tous ces faits, n’a pas plus de poids que les quatre mille gredins qui virent les miracles de l’abbé Paris.
Dira-t-on que ces contradictions de la bande de Du Jonquay sont des preuves en sa faveur, « parce qu’elles ne sont pas faites de concert[2] » ? Non, messieurs, ils ne se sont pas concertés pour se couper dans leurs réponses, mais ils s’étaient concertés pour le crime.
Enfin, messieurs, je vous le répète. Du Jonquay et sa mère ont librement avoué, ont signé leur crime chez un commissaire au Chatelet, dont la réputation est intacte. Ils n’ont été forcés à