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Songez que sous l’empire florissant d’Auguste, qui fit régner les lois et les mœurs, à ce que dit Horace[1], les chèvres ne furent pas absolument méprisées dans les campagnes : les boucs en étaient jaloux. Souvenez-vous du Novimus et qui te[2] de Virgile : les nymphes en rirent, dit-il ; et, si vous m’en croyez, vous en rirez aussi, au lieu de vous fâcher, comme M. Larcher, du collège Mazarin, s’est fâché contre le neveu[3] de l’abbé Bazin, qui n’y entendait pas finesse.

Le maréchal de La Feuillade écrivit un jour au prince de Monaco : « Lasciamo queste porcherie orrende : non ho mai fatto il peccato di bestialità che con Vostra Altezza. »

XV. — Des sorciers.

Je ne sais jamais si c’est au juif, ou au secrétaire de la rue Saint-Jacques[4], ou au savant d’un village près d’Utrecht, à qui j’ai l’honneur de parler. Quoi qu’il en soit, c’est toujours en général à Israël que mes réponses doivent être adressées.

Israël prétend qu’on s’est contredit quand on a parlé du sabbat des sorciers. Il n’y a point de démonographe qui n’ait assuré que les sorciers qui allaient au sabbat par les airs sur un manche à balai, pour adorer le bouc, avaient reçu cette méthode des Juifs, et que le mot sabbat en faisait foi.

Vous dites que ceux qui sont de cette opinion se contredisent, en ce qu’ils conviennent que les Juifs, avant la transmigration, ne connaissaient pas encore les noms des anges et des diables, et même n’admettaient point de diable ; par conséquent ils ne pouvaient se donner au diable, comme ont fait les sorcières, et baiser le diable au derrière sous la figure du bouc.

Mais aussi, messieurs, ce n’est que depuis votre dispersion que vous avez été accusés d’enseigner la sorcellerie aux vieilles. Ce sont les anciens Juifs du temps de Nabuchodonosor, du temps de Cyrus, les anciens Juifs du temps de Titus, du temps d’Adrien, et non les anciens du temps de la fuite d’Égypte, qui coururent chez les nations vendre des philtres pour se faire aimer, des paroles pour chasser les mauvais génies, des onguents pour aller au sabbat en dormant, et cent autres sciences de cette espèce.

  1. Épitre I du livre II, vers 1-3.
  2. Églog. iii, 8.
  3. Larcher a publié une Réponse à la Défense de mon oncle ; voyez la note, tome XXVI, page 367.
  4. Voyez page 507.