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SUR L’HISTOIRE GÉNÉRALE.

taire eut ses abus : ils furent poussés au point qu’un Spartiate voulant s’initier, et le prêtre voulant le confesser : Est-ce à Dieu ou à toi que je parlerai ? dit le Spartiate. — À Dieu, répondit l’autre. — Retire-toi donc, ô homme[1] !

Les Juifs étaient obligés par la loi d’avouer leur délit lorsqu’ils avaient volé leurs frères, et de restituer le prix du larcin avec un cinquième par-dessus. Ils confessaient en général leurs péchés contre la loi, en mettant la main sur la tête d’une victime. Buxtorf nous apprend que souvent ils prononçaient une formule de confession générale, composée de vingt-deux mots, et qu’à chaque mot on leur plongeait la tête dans une cuvette d’eau froide ; que souvent aussi ils se confessaient les uns aux autres ; que chaque pénitent choisissait son parrain, qui lui donnait trente-neuf coups de fouet, et qui en recevait autant de lui à son tour. Enfin l’Église chrétienne sanctifia la confession. On sait assez comment les confessions et les pénitences furent d’abord publiques ; quel scandale il arriva sous le patriarche Nectaire, qut abolit cet usage ; comment la confession s’introduisit ensuite peu à peu dans l’Occident. Les abbés confessèrent d’abord leurs moines[2] ; les abbesses mêmes eurent ce droit sur leurs religieuses.

Saint Thomas dit expressément dans sa Somme[3] : « Confessio, ex defectu sacerdotis, laïco facta, sacramentalis est quodam modo. — Confession à un laïque, au défaut d’un prêtre, est comme sacrement.

Saint Basile fut le premier qui permit aux abbesses d’administrer la confession à leurs religieuses, et de prêcher dans leurs églises. Innocent III, dans ses lettres, n’attaqua point cet usage. Le P. Martène, savant bénédictin, parle fort au long de cet usage, dans ses Rites de l’Église[4]. Quelques jésuites, et surtout un Nonotte, qui n’avaient lu ni Basile, ni Martène, ni les Lettres d’Innocent III, que nous avons lues dans l’abbaye de Sénones, où nous séjournâmes quelque temps dans nos voyages entrepris pour nous instruire, s’élevèrent contre ces vérités. Nous nous moquâmes un peu d’eux[5]. Il faut l’avouer : notre amour extrême de la vérité n’exclut pas les faiblesses humaines.

C’est une chose rare que cette persévérance d’ignorance et

  1. Voyez tome XVIII, pages 223 et 230.
  2. Voyez le Dictionnaire philosophique, au mot Confession. (Note de Voltaire.)
  3. Tome III, page 255, Supplem. tertiœ partis, Quæstio viii, art. 2. (Id.) — Voyez la note 3, tome XXIV, page 513.
  4. Voyez tome XIV, page 125.
  5. Voyez tome XXIV, pages 491-92, 504, 513 ; et XXVI, 147.