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de faire créer aussitôt que les prophéties qui annonçaient le rétablissement des jésuites seraient accomplies.



DISCOURS DE ME BELLEGUIER.


Non magis Deo quam regibus infensa est ista quæ vocatur hodie philosophia.
Cette qu’on nomme aujourd’hui philosophie n’est pas plus ennemie de Dieu que des rois.


Je ne compose pas pour le prix de l’Université : je n’ai pas tant d’ambition ; mais ce sujet me paraît si beau et si bien énoncé que je ne puis résister à l’envie d’en faire mon thème.

Non, sans doute, la philosophie n’est et ne peut être l’ennemie de Dieu ni des rois, s’il est permis de mettre des hommes à côté de l’Être éternel et suprême. La philosophie est expressément l’amour de la sagesse, et ce serait le comble de la folie d’être l’ennemi de Dieu, qui nous donne l’existence, et des rois, qui nous sont donnés par lui pour rendre cette existence heureuse, ou du moins tolérable. Osons d’abord dire un petit mot de Dieu, nous parlerons ensuite des rois. Il y a l’infini entre ces deux objets.

DE DIEU.

Socrate fut le martyr de la Divinité, et Platon en fut l’apôtre. Zaleucus, Charondas, Pythagore, Solon, et Locke, tous philosophes et législateurs, ont recommandé dans leurs lois l’amour de Dieu et du gouvernement sous lequel il nous a fait naître. Les beaux vers du véritable Orphée[1], que nous trouvons épars dans Clément d’Alexandrie, parlent de la grandeur de Dieu avec sublimité. Zoroastre l’annonçait à la Perse, et Confutzée à la Chine. Quoi qu’en ait dit l’ignorance, appuyée de la malignité, la philosophie fut dans tous les temps la mère de la religion pure et des lois sages.

S’il y eut tant d’athées chez les Grecs trop subtils, et chez les Romains, leurs imitateurs, n’imputons qu’à des menteurs publics,

  1. Voltaire cite un passage de l’hymne d’Orphée dans une de ses notes d’Olympie : voyez tome VI, pages 98-99.