Page:Voltaire - Œuvres complètes Garnier tome28.djvu/522

Cette page n’a pas encore été corrigée

duchesse de Popoli, vingt mille pistoles aux jésuites, trente mille à ses parents ; il n’avait rien.

On a vu cent testaments frauduleux depuis celui de sir Ciapelleto jusqu’à celui de Cerisantes.

Pourquoi notre veuve affirme-t-elle, dans ce dernier acte, que son petit-fils a porté trois cent mille livres en or en treize voyages ? Elle ne l’a pas vu, et cela peut lui avoir été dicté par lui.

Sa déclaration ne rend pas les treize voyages de son petit-fils moins ridicules ; sa fille et son petit-fils n’en ont pas moins avoué devant un commissaire un crime assez grand ; la possession de cent mille écus en or, sans en faire usage pendant plusieurs années, n’en est pas moins improbable. Elle avait tenu un appartement de mille livres dans la rue Quincampoix vers le temps du système, et immédiatement après la mort de son mari, elle prit un logement de deux cent cinquante livres, et ensuite un de quatre cents livres : ce qui fait croire que son mari n’avait pas fait une très-grande fortune, et que ces cent mille écus en or pourraient bien être une fable.

Toutes ces vraisemblances, balancées avec son testament, paraissent lui ôter beaucoup de son poids. Ayant donc porté à cent contre la famille la valeur de l’aveu fait par les accusés, je ne peux porter plus haut la valeur du testament. En ce cas, je réduirai à cinquante les probabilités de l’accusateur.


NOUVELLES PROBABILITÉS A EXAMINER DANS CETTE AFFAIRE.

Il faut tâcher de pénétrer dans le mystère d’iniquité qui paraît présumable, mais qui est pourtant très-extraordinaire dans la famille accusée, dans ses témoins et dans ses fauteurs.

Voilà un jeune homme, sa mère et ses sœurs, qui demandent justice à grands cris, et qui disent : On nous vole notre subsistance. Ils demandent vengeance de la cruelle persécution qu’ils ont soufferte. Ils prétendent avoir été forcés par les menaces, par les coups, par les chaînes, à s’avouer coupables, lors même qu’on leur arrachait toute leur fortune. Les sœurs elles-mêmes se plaignent que le commis de police, qui a extorqué un aveu de leur frère avec fureur, en a obtenu aussi un de leur main par fourberie ; elles reviennent avec leur frère et leur mère contre cet aveu. Serait-il possible que quatre personnes si intéressées à nier une telle iniquité l’eussent confessée si la vérité ne les y eût pas forcées ? Mais enfin elles prétendent qu’elles n’y ont été forcées que par la crainte. Il leur est permis de réclamer contre une