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A CICÉRON. 449

IX, — Des deux principes, et de quelques autres fables.

Les Perses, pour expliquer l'origine du mal, imaginèrent, il y a quelque neuf mille ans, que Dieu, qu'ils appellent Oromase ou Orosmade, s'était complu à former un être puissant et mé- chant, qu'ils nomment, je crois, Arimane, pour lui servir d'anta- goniste; et que le bon Oromase, qui nous protège, combat sans cesse Arimane, le malin qui nous persécute. C'est ainsi que j'ai vu un de mes centurions qui se battait tous les matins contre sou singe pour se tenir en haleine.

D'autres Perses, et c'est, dit-on, le plus grand nombre, croient le tyran Arimane aussi ancien que le bon prince Orosmade. Ils disent qu'il casse les œufs que le favorable Orosmade pond sans cesse, et qu'il y fait entrer le mal; qu'il répand les ténèbres par- tout où l'autre envoie la lumière; les maladies, quand l'autre donne la santé, et qu'il fait toujours marcher la mort à la suite de la vie. Il me semble que je vois deux charlatans en plein marché, dont l'un distribue des poisons, et l'autre des antidotes.

Des mages s'efforceront, s'ils veulent, de trouver de la raison dans cette fable : pour moi je n'y aperçois que du ridicule; je n'aime point à voir Dieu, qui est la raison même, toujours occupé comme un gladiateur à combattre une bête féroce.

Les Indiens ont une fable plus ancienne : trois dieux réunis dans la même volonté, Birma ou Brama, la puissance et la gloire; Vitsnou ou Bitsnou, la tendresse et la bienfaisance; Sub ou Sib, la terreur et la destruction, créèrent d'un commun accord des demi-dieux, des debtadansle ciel. Ces demi-dieux se révoltèrent; ils furent précipités dans l'abîme par les trois dieux, ou plutôt par le grand Dieu qui présidait à ces trois. Après des siècles de punition, ils obtinrent de devenir hommes, et ils apportèrent le mal sur la terre : ce qui obhgea Dieu ou les trois dieux de donner sa nouvelle loi du Veidam.

Mais ces coupables, avant de porter le mal sur la terre, l'avaient déjà porté dans le ciel. Et comment Dieu avait-il créé des êtres qui devaient se révolter contre lui? Comment Dieu aurait-il donné une seconde loi dans dans son Veidam? Sa pre- mière était donc mauvaise ?

Ce conte oriental ne prouve rien, n'explique rien; il a été adopté par quelques nations asiatiques, et enfin il a servi de modèle à la guerre des Titans.

Les Égyptiens ont eu leur Osiris et leur Typhon.

28. — xMklanges. VII. 29

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