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a des principes généraux qui peuvent êlre appliqués utile- ment»? C'est dans cet étrange livre, imprimé en 1733, qu'on lit, page 222, que « le mainmortable ne peut prescrire la liberté; que la prescription de cent ans, ou d'un temps immémorial, ne suffit pas; qu'il faut un titre valable ou une possession accom- pagnée d'actes éclatants et manifestes ». L'auteur est un peu dif- ficile en liberté, il n'en est pas l'apôtre. Mais en revanche, page 221 , il met à l'aise le seigneur, et déclare que celui-ci « peut acquérir la prescription contre l'homme franc par quarante ans ; comme je l'ai fait voir, ajoute-t-il, dans mon Traité des Prescriptions, part, III, cliap. ii, page 390 ».
Quand on a lu la coutume et l'ouvrage dont on vient de voir un petit précis; quand on a vu les hommes-plantes qui en font la matière, on est affligé qu'à leur égard le droit qu'a la France de rendre libre soit inutile, tandis qu'il ne l'est pas pour les nègres de Guinée. Nos maximes saines sur la liberté brisent leurs fers^; elles brisent ceux des esclaves des despotes de l'Orient; et l'on dérobe ou soustrait à leur protection la moitié des citoyens d'une province, qui depuis un siècle se battent ou payent ceux qui se battent pour l'heureux empire qui se vante de ses maximes. On est indigné qu'il y ait des jurisconsultes pour entretenir, par leurs discussions, une coutume aussi cruelle, aussi indécemment folle.
Les anciens souverains de la Franche-Comté, les archiducs Albert et Isabelle, donnèrent dans leurs terres, il y a deux siècles, un exemple d'humanité et de raison en affranchissant tous leurs sujets; plusieurs seigneurs illustres les imitèrent. Mais ni les moines ni plusieurs gens d'église n'ont été touchés des respec- tables motifs qui déterminaient les souverains et la noblesse ; ils ont conservé leur sceptre de fer; ils ont appesanti et prolongé les chaînes : on les a vus poursuivre à Metz et à Paris un secrétaire du roi, sous prétexte de son origine, ou du domicile qu'il avait eu dans sa jeunesse sur un fonds mainmortable; on les a vus refuser le prix que des habitants leur offraient pour être déclarés libres.
On va demander comment des sujets si nombreux n'ont pas réclamé contre cet abus. La réponse est simple : les tribunaux
��t. Ceci n'est pas exact. On peut, au moyen de quelques formalités, conserver en France des nègres esclaves. A la vérité, le prétendu droit qui résulte de ces formalités, reconnues par les tribunaux de l'amirauté, est méconnu par les par- lements. Mais comment un esclave nègre pourra-t-il deviner qu'il existe en France deux tribunaux rendant la justice au nom du même prince, par l'un desquels il est libre, tandis qu'il reste esclave suivant l'autre? (K.)
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