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DE FRANCHE-COxMTÉ. 375

Voilà le sommaire crime partie des maux de mainmorte ou esclavage personnel. Voici ce qui tient au réel.

Tous les actes civils sont également grevés chez ces malheu- reux : ils ne peuvent vendre ni échanger sans le consentement du seigneur, à peine de confiscation. Ce consentement se fait l)ayer un tiers de la chose : le droit d'hypothèque se vend au même prix. On ne peut même hypothéquer une dot, un titre clérical, le prix de la vente, les deniers prêtés pour l'accjuisition. Surdus et Bouvot sont les cautions de Dunod et de sa coutume. Un homme riche meurt subitement; le seigneur prend le bien et ne paye pas les dettes qu'un débiteur suffisant et de bonne foi, prévenu de mort, n'a pas pu payer. La dot de la femme n'est pas rendue i)ar le seignenr héritier du mari. Un vieillard infirme, sans enfants, ne pouvant faire valoir son bien, ne peut ni vendre ni emprunter pour se secoui-lr.

Ces écueils ne sont pas les seuls qui soient semés sous les pas de ces malheureux : les actes entre eux présentent autant de difficultés que de circonstances. Les tribunaux sont char- gés de procès inextricables, occasionnés par des lois et une jurisprudence de barbares, destructives de tous principes. Les seigneurs se disputent entre eux les successions; l'un se dit sei- gneur de l'origine, l'autre du domicile du mort. Avides et dili- gents à l'exercice de leurs prétendus droits, ils vont réclamer des successions échues dans les ])ays et provinces éloignés; le parle- ment de Paris les a dès longtemps refusés; ils ont été refusés aussi en Lorraine, anciennement et récemment. Le commenta- teur voit avec bien du regret la rébellion des tribunaux étran- gers à la petite coutume qu'il a prise sous sa protection.

Contre tant de maux la coutume laisse une ressource que le commentateur appelle une faveur : c'est V affranchissement par désaveu. L'esclave peut renoncer son seigneur en laissant tous les biens qu'il tient en mainmorte et les deux tiers de ses meubles. Cela se fait par sentence; il peut se faire aussi par convention. Le commentateur trouve beaucoup d'obstacles à ces deux actes. Ensuite il demande si le sacerdoce, les grades, les offices, affran- chissent? il dit que non. Si l'épiscopat, les dignités, l'anoblisse- ment, affranchissent? cette fois il dit oui : ce n'est cependant pas sans y trouver quelques difficultés.

Faut-il enfin que ce professeur d'esclavage s'étonne de ce que (c les auteurs français ne se sont pas appliqués à approfondir, comme ils ont fait heureusement tant d'autres matières, celle de la mainmorte, le plus étendu des droits seigneuriaux, qui

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