sentement, à l'heure de ma mort. » Ce furent là aussi ses dernières paroles ; il les prononça à l'agonie avec celles-ci : « Faites-moi miséricorde, mon Dieu ; venez à mon aide, hâtez-vous de me secourir. «
Le roi étant revenu d'une grande faiblesse, et voyant auprès de lui Mme de Maintenon, il lui dit : « Il faut, madame, que vous ayez bien du courage et bien de l'amitié pour moi, pour demeurer si longtemps [1].»
Le roi fit venir monsieur le dauphin, à qui il dit : « Mon enfant, vous allez être un grand roi ; ne m'imitez pas dans le goût que j'ai eu pour la guerre ; songez toujours à rapporter à Dieu toutes vos actions ; faites-le honorer par vos sujets : je suis fâché de les laisser dans l'état où ils sont. Suivez toujours les bons conseils ; aimez vos peuples : je vous donne le P. Le Tellier pour confesseur [2]. N'oubliez jamais la reconnaissance que vous devez à Mme la duchesse de Ventadour : pour moi, madame, ajouta le roi, je ne puis trop vous marquer la mienne. » Il embrassa le dauphin par deux fois, il lui donna sa bénédiction ; et, comme il s'en allait, il leva les mains au ciel, et fit une prière en le regardant.
Le roi ayant entendu la messe le lendemain qu'il eut reçu ses sacrements, il fit approcher les cardinaux de Rohan et de Bissy, et il leur dit en présence d'un grand nombre de courtisans, qu'il était satisfait du zèle et de l'application qu'ils avaient fait paraître pour la défense de la bonne cause [3] ; qu'il
- ↑ Cela est très-vrai, et se retrouve ailleurs.
- ↑ Ce discours de Louis XIV à son successeur n'est pas exactement rapporté, il s'en faut de beaucoup. Il est très-faux qu'il dit au dauphin : « Je vous donne le P. Le Tellier pour confesseur. » On ne donne point d'ailleurs un confesseur à un enfant qui n'a pas six ans. Il faut avouer que ces mémoires sont d'un homme d'un esprit très-faible, qui paraît affilié des jésuites.
- ↑ Il oublie que le roi dit à ces deux cardinaux : « Si on m'a trompé, on est bien coupable. » Il a été avéré en effet qu'on l'avait trompé, et que c'était son confesseur Le Tellier qui avait lui-même fabriqué la minute de cette malheureuse bulle qui troubla la France, Jamais homme ne calomnia plus effrontément, ne joignit tant de fourberie à tant d'audace, et ne couvrit plus ses crimes du manteau de la religion. Il fut sur le point de faire condamner le vertueux cardinal de Noailles, et il abusa de la confiance de Louis XIV jusqu'à lui faire signer l'exil ou la prison de plus de deux mille citoyens. Ce scélérat fut exilé lui-même après la mort du roi : punition trop douce de ses noirceurs et de ses barbaries. Le grand malheur de Louis XIV fut d'avoir été trop ignorant. Pour peu qu'il eût lu seulement l'Histoire du président de Thou, il se serait défié de son confesseur, au lieu de le