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BARBARIES CHRÉTIENNES.

tyrannie jusqu’à défendre pendant trois jours de suite d’obéir à la Providence et à la nature. Ils condamnent les peuples à une oisiveté criminelle, et cela de leur autorité privée, sans que les peuples osent se plaindre, sans que les magistrats osent interposer le pouvoir des lois civiles, seul pouvoir raisonnable. Si les évêques ont partout usurpé les droits des princes, il ne faut pas croire que les pasteurs de nos églises réformées aient eu moins d’ambition et de fureur. On n’a qu’à lire dans notre historien philosophe Hume les sombres et absurdes atrocités de nos presbytériens d’Écosse. Le sang s’allume à une telle lecture ; on est tenté de punir, des insolences de leurs prédécesseurs, ceux d’aujourd’hui qui étalent les mêmes principes. Tout prêtre, n’en doutons pas, serait, s’il le pouvait, tyran du genre humain. Jésus n’a été que victime. Voyez donc comme ils ressemblent à Jésus !

S’ils nous répondent ce que j’ai entendu dire à plusieurs d’entre eux, que Jésus leur a communiqué un droit dont il n’a pas daigné user, je répéterai ici ce que je leur ai dit, qu’en ce cas c’est aux Pilates de nos jours à leur faire subir le supplice que ne méritait pas leur maître.

Nous avons encore brûlé deux ariens sous le règne de Jacques Ier. De quoi étaient-ils coupables ? De n’avoir pas attribué à Jésus l’épithète de consubstantiel, qu’assurément il ne s’était pas donnée lui-même.

Le fils de Jacques Ier a porté sa tête sur un échafaud ; nos infâmes querelles de religion ont été la principale cause de ce parricide. Il n’était pas plus coupable que nos deux ariens exécutés sous son père.


CHAPITRE XLII.
De Jésus, et des meurtres commis en son nom.


Il faut prendre Jésus-Christ comme on nous le donne. Nous ne pouvons juger de ses mœurs que par la conduite qu’on lui attribue. Nous n’avons ni de Clarendon ni de Hume qui ait écrit sa vie. Ses évangélistes ne lui imputent d’autre action d’homme violent et emporté que celle d’avoir battu[1] et chassé très-mal à propos les marchands de bêtes de sacrifice, qui tenaient leur boutique à l’entrée du temple. À cela près, c’était un homme fort

  1. Jean, ii, 15.