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EXAMEN DU DISCOURS

le connaîtriez pas : il ne serait que le Béarnais, un carabin, un relaps, un apostat. Le duc de Mayenne serait un homme envoyé de Dieu ; le pape l’aurait canonisé (tout attaqué qu’il était de la vérole) ; saint Philippe et saint Jean lui seraient apparus plus d’une fois. Et toi, jésuite Daniel, comme tu aurais flatté Mayenne dans ta sèche et pauvre histoire ! comme il aurait poursuivi sa pointe ! comme il aurait toujours battu le Béarnais à plate couture ! comme l’Église aurait triomphé[1] !

Careat successibus opto
Quisquis ab eventu facta notanda putat.

(Ovid., Heroïd., II, v. 85.)



EXAMEN

DU DISCOURS DE L’EMPEREUR JULIEN

contre la secte des Galiléens.


On ne sait dans quel temps l’empereur Julien composa cet ouvrage, qui eut une très-grande vogue dans tout l’empire par la nature du sujet et par le rang de l’auteur. Un tel écrit aurait pu renverser la religion chrétienne, établie par Constantin, si Julien eût vécu longtemps pour le bonheur du monde ; mais après lui le fanatisme triompha, et les livres étant fort rares, ceux des philosophes ne restèrent que dans très-peu de mains, et surtout en des mains ennemies. Dans la suite, les chrétiens se firent un devoir de supprimer, de brûler tous les livres écrits contre eux. C’est pourquoi nous n’avons plus les livres de Plotin, de Jamblique, de Celse, de Libanius ; et ce précieux ouvrage de Julien serait ignoré si l’évêque Cyrille, qui lui répondit quarante ans après, n’en avait pas conservé beaucoup de fragments dans sa réfutation même.

Ce Cyrille était un homme ambitieux, factieux, turbulent, fourbe et cruel, ennemi du gouverneur d’Alexandrie, voulant tout brouiller pour tout soumettre, s’opposant continuellement aux magistrats, excitant les partisans de l’ancienne religion

  1. Expressions du P. Daniel. (Note de Voltaire.)