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MENSONGES DE CLAUSTRE.

fermier général, a voulu s’adresser à lui plutôt qu’à Pierre : il s’est imaginé qu’il pourrait le faire passer pour tuteur des enfants de sa sœur, et pour administrateur de leur bien, afin de pouvoir tomber sur lui. Il dirigeait ainsi ses attaques contre ceux qui étaient en état de payer la plus grosse rançon. Il s’est encore trompé dans cette supposition. Les accusateurs sont obligés d’avoir doublement raison, et Claustre a toujours tort.

Voici ce qu’il demandait avec discrétion :

158,000 livres qui avaient été payées ;
103,888 livres, aussi déjà payées ;
177,155 livres, aussi déjà payées en plusieurs articles.

Voici déjà une somme d’environ deux cent trente-neuf mille francs que ce Claustre, qui voulait passer sa vie à la Doctrine chrétienne, demandait pour lui et pour la demoiselle Boutaudon, sous le nom du sieur Desmartres fils, qui n’en savait rien. Il y a encore d’autres articles : le tout monte à environ cent mille écus. Il a déjà été condamné d’une voix unanime aux requêtes du Palais sur presque tous les articles.

CONCLUSION.

Il y a deux sortes de justices, celle du barreau, et celle du public. Au barreau l’on est débouté, c’est-à-dire déchu de ses prétentions injustes, debotat et debotavit ; le public juge l’hypocrisie, l’ingratitude, l’esprit de rapacité et le mensonge. À quoi condamne-t-il un tel coupable ? il le déboute de ses prétentions à la piété et à l’honneur ; il lui conseille de retournera la Doctrine chrétienne, de ne plus apporter le glaive[1], mais la paix dans les familles, de ne plus diviser le fils et le père, la fille et la mère, la bru et la belle-mère. Cela est très-bon ailleurs, mais non dans un précepteur qui reçoit des gages : chaque chose, chaque homme doit être à sa place.

Tel est le précis très-informe de la cause célèbre ou non célèbre de l’abbé Claustre. Je n’ai pas l’honneur d’être de l’ordre des avocats, mais je suis de l’ordre de ceux qui aiment la vérité et l’équité.

FIN DU PROCÈS DE CLAUSTRE.
  1. Matthieu, x, 34, 35.