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DE KA3riNIECK EN POLOGNE. 77

nation, qui ont demandé la tolérance. Une puissante impératrice^ le seconde dans cette entreprise, la plus humaine, la plus juste, la plus glorieuse dont l'esprit humain puisse jamais s'honorer. Ils sont les bienfaiteurs de l'humanité entière, n'en soyez pas les destructeurs. Voudriez-vous n'être que des homicides sangui- naires, sous prétexte que vous êtes catholiques ?

Votre primat est catholique aussi. Ce mot veut dire universel-, quoique en effet la religion catholique ne compose pas la centième partie de l'univers. Mais ce sage primat a compris que la véri- table manière d'être universel est d'embrasser dans sa charité tous les peuples de la terre, et d'être surtout l'ami de tous ses concitoyens. Il a su que si un homme peut en quelque sorte, sans blasphème, ressemblera la Divinité, c'est en chérissant tous les hommes, dont Dieu est également le père. Il a senti qu'il était patriote polonais avant d'être serviteur du pape, qui est le ser- viteur des serviteurs de Dieu. Il s'est uni à plusieurs prélats qui, tout catholiques universels qu'ils sont, ont cru que l'on ne doit pas priver ses frères du droit de citoyens, sous prétexte qu'ils vont au jardin par une autre allée que vous.

Cette auguste impératrice, qui vient d'établir la tolérance pour la première de ses lois dans le plus vaste empire de la terre, se joint à votre roi, à votre primat, à vos principaux palatins, à vos plus dignes évêques, pour vous rendre humains et heureux. Au nom de Dieu et de la nature, ne vous obstinez pas à être bar- bares et infortunés.

Nous avouons qu'il y a parmi vous de très-savants moines qui prétendent que, Jésus ayant été supplicié à Jérusalem, la religion chrétienne ne doit être soutenue que par des bourreaux, et qu'ayant été vendu trente deniers par Judas tout chrétien doit les intérêts échus de cet argent à notre saint père le pape, suc- cesseur de Jésus.

Ils fondent ce droit sur des raisons, à la vérité, très-plausibles, et que nous respectons.

Premièrement, ils disent que l'assemblée étant fondée sur la pierre^ et Simon Barjone, paysan juif, né auprès d'un petit lac juif, ayant changé son nom en celui de Pierre, ses successeurs sont par conséquent la pierre fondamentale, et ont à leur ceinture les clefs du royaume des cieux et celles de tous les coffres-forts. C'est une vérité dont nous sommes bien loin de disconvenir,

1. Catherine II.

2. Voyez tome XVI, page 426.

3. Matthieu, xvi, 18.

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