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LE CRI DES NATIONS. 573

Quint eut l'audace d'appeler Henri IV « génération bâtarde et détestable de la maison de Bourbon », et de la déclarer incapable de posséder un seul de ses héritages. 11 faut le dire à nos con- temporains, et les conjurer de i-edire à nos descendants, que ce sont ces seules maximes qui portèrent le couteau dans le cœur du plus grand de nos héros et du meilleur de nos rois. Il faut, en versant des larmes sur la destinée de ce grand homme, répéter qu'on eut une peine extrême à obtenir de Clément VIII qu'il lui donnât une absolution dont il n'avait que faire, et à empêcher que ce pape n'insérât dans cette aljsolution a qu'il réintégrait de sa pleine autorité Henri IV dans le royaume de France ^ »,

Quelques personnes, plus confiantes qu'éclairées, veulent nous consoler en nous disant que ces abominations ne revien- dront plus. Hélas! qui vous l'a dit? Le fanatisme est-il entièrement extirpé? Nesavez-vous pas de quoi il est capable? La plupart des honnêtes gens sont instruits, je l'avoue; les maximes des par- lements sont dans nos bouches et dans nos cœurs ; mais la po- pulace n'est-elle pas ce qu'elle était du temps de Henri III et de Henri IV? N'est-elle pas toujours gouvernée par des moines? N'est-elle pas trois cents fois au moins plus nombreuse que ceux qui ont reçu une éducation honnête? N'est-ce pas enfin une traînée de poudre à laquelle on peut mettre un jour le feu.

Jusqu'à quand se contentera-t-on de palliatifs dans la plus horrible et la plus invétérée des maladies? Jusqu'à quand se croira-t-on en pleine santé, parce que nos maux ont quelque relâche? C'est aux magistrats, c'est aux hommes qui partagent le fardeau du gouvernement à voir quelle digue ils peuvent mettre à des débordements qui nous ont inondés depuis tant de siècles. Chaque père de famille est conjuré de peser ces grandes vérités, de les graver dans la tête de ses enfants, et de préparer une pos- térité qui ne connaisse que les lois et la patrie.

On se sert encore parmi nous du mot dangereux des deux puissances^; mais Jésus-Christ ne l'a jamais employé; il ne se trouve dans aucun Père de l'Église ; il a toujours été inconnu à l'Église grecque, et, en dernier lieu, un évêque grec a été déposé

��1. Voyez tome XIII, page 107.

2. Voyez les Remontrances du clergé au roi, en 1755, ses Actes de 1765, etc. On souffre ses entreprises parce qu'il les forme dans des assemblées où il donne quelques millions, et que l'on n'a pas encore osé le soumettre, comme les pairs du royaume, à la capitation et au vingtième, quoiqu'un grand vicaire soit souvent beaucoup mieux payé qu'un maréchal de France. (K.) — Voyez aussi sur les deux puissances, tome XX, page 300; et XXV, 3i7.

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