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lard, et à une autre heure jeune homme. Il changeait de sexe et d’âge, et prenait successivement plusieurs figures par le ministère du diable. Ce que voyant Néron, il pensait qu’il était le véritable fils de Dieu ; mais l’apôtre Pierre enseignait qu’il était voleur, menteur, magicien, vilain scélérat, et, dans toutes les choses qui sont de Dieu, adversaire de la vérité ; et qu’il ne restait plus rien qu’à faire connaître, par l’ordre de Dieu, son iniquité devant tout le monde. Alors Simon, étant entré vers Néron, dit : Écoutez-moi, bon empereur ; je suis le fils de Dieu qui suis descendu du ciel : jusqu’à présent, je souffrais Pierre, qui se dit apôtre ; mais à présent le mal est doublé, car l’on dit que Paul, qui enseigne aussi les mêmes choses, et qui pense contre moi, prêche avec lui : ce qu’il y a de certain, c’est que si vous ne pensez pas à les faire mourir, votre royaume ne pourra pas subsister.

Alors Néron, agité d’inquiétude, ordonna qu’on les lui amenât promptement. Or, le lendemain, comme Simon le Magicien, et les apôtres de Christ, Pierre et Paul, furent entrés vers Néron, Simon dit : Ce sont là les disciples de ce Nazaréen, qui n’ont pas tant de bonheur que d’être du peuple des Juifs. Néron dit : Qu’est-ce que le Nazaréen ? Simon dit : Il y a une ville dans la Judée qui a toujours fait contre vous : elle s’appelle Nazareth, et leur maître en était. Néron dit : Dieu avertit tout homme et le chérit. Pourquoi les persécutez-vous ? Simon dit : C’est cette race d’hommes qui ont détourné toute la Judée de me croire. Néron dit à Pierre : Pourquoi êtes-vous si perfides, comme votre race ? Alors Pierre dit à Simon : Vous en avez pu imposer à tous, mais jamais à moi ; et ceux que vous aviez trompés, Dieu les a retirés par moi de votre erreur ; et puisque vous avez éprouvé que vous ne pouvez me surpasser, j’admire de quel front vous vous vantez, en présence du roi, de surpasser par votre art magique les disciples de Jésus-Christ. Néron dit : Quel est le Christ ? Pierre dit : Celui-là est le Christ, qui a été crucifié pour la rédemption du monde ; et ce Simon le Magicien affirme que c’est lui qui l’est ; mais il est un homme très-méchant, et ses œuvres sont diaboliques. Or si vous voulez savoir, ô empereur ! ce qui s’est passé en Judée touchant le Christ, envoyez, et prenez les lettres de Ponce Pilate, adressées à Claude César ; et ainsi vous connaîtrez toutes choses. Néron, ayant entendu cela, les fit prendre et lire en sa présence. Or le texte de l’écriture était de cette manière :


PONCE PILATE SALUE CLAUDE, etc.[1]
  1. Voyez cette Lettre de Ponce Pilate, page 537.