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38 CONSEILS RAISONNABLES

convulsionnaires. Quand les esprits sont échauffés, quand le gou- vernement, en exerçant des rigueurs imprudentes, allume lui- même, par sa persécution, le feu qu'il croit éteindre, quand les martyres ont fait de nouveaux prosélytes; alors quelque homme puissant se met à la tête du parti ; alors l'amhition crie de tous côtés : Religion! religion! Dieu ! Dieu! Alors on s'égorge au nom de Dieu. Voilà, monsieur, l'histoire de toutes les sectes, excepté celle des primitifs appelés quakers ^

Nous osons donc nous flatter que désormais, en réfutant M. Fréret, vous aurez plus d'attention à ne pas affaiblir notre cause par des allégations trop indignes de vous.

��Nous pensons qu'il faut convenir que la religion chrétienne est la seule au monde dans laquelle on ait vu une suite presque continue, pendant quatorze cents années, de discordes, de per- sécutions, de guerres civiles, et d'assassinats, pour des arguments théologiques. Cette funeste vérité n'est que trop connue; plût à Dieu qu'on pût en douter ! Il est donc, à notre avis, très-nécessaire que vous preniez une autre route. Il faut que votre science et votre esprit se consacrent à démêler par quelle voie une religion si divine a pu seule avoir ce privilège infernal.

VI.

Nos adversaires prétendent que la cause de ces fléaux si longs et si sanglants est dans ces paroles de l'Évangile : « Je suis venu apporter le glaive et non la paix-. »

« Que celui qui n'écoute pas l'Église soit comme un GentiP, ou comme un chevalier romain, un fermier de l'empire » (car puhlicain signifiait un chevalier romain, fermier des revenus de l'État).

Ils disent ensuite que Jésus, étant venu donner une loi, n'a jamais rien écrit; que les Évangiles sont obscurs et contradictoires; que chaque société chrétienne les expliqua différemment; que la plupart des docteurs ecclésiastiques furent des Grecs platoniciens qui chargèrent notre religion de nouveaux mystères dont il n'y a pas un seul mot dans les Évangiles; que ces Évangiles n'ont point dit que Jésus fût consubstantiel à Dieu, que Jésus fût descendu

��1. Voyez tome XXII, pages 82 et suiv.

2. Matthieu, x, 34.

3. Ibid., xviii, 17.

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